Michel, 71 ans, consulte car, depuis quelques semaines, il est dyspnéique lors d’une marche soutenue, et asthénique. Nous connaissons bien ce patient traité pour un diabète de type 2 bien équilibré (HbA1c à 6,7 %) avec de la metformine (2 comprimés de 1 g par jour), une maladie de Parkinson traitée par 3 gélules de Modopar®250 par jour. Un collègue rééducateur consulté récemment lui a expliqué que l’asthénie était en relation avec la pose d’une prothèse de genou effectuée deux mois auparavant. Néanmoins, du fait de la symptomatologie de Michel, nous effectuons un examen clinique complet qui permet de retrouver une matité à la percussion de la base du poumon gauche, mais aussi l’absence de murmure vésiculaire du côté gauche. En conséquence, nous avons demandé la réalisation d’un scanner thoracique, qui permet d’objectiver une volumineuse masse lobaire inférieure gauche hétérogène de 17 cm de grand axe (cliché 1). On note également l’existence d’un épanchement pleural qui conforterait l’hypothèse d’une tumeur d’origine pleurale. Michel est alors confié à un pneumologue qui effectue une ponction transthoracique. Le compte rendu anatomopathologique pose le diagnostic de tumeur fibreuse solitaire pédiculée bénigne.
INTRODUCTION
La tumeur fibreuse solitaire, autrefois appelée fibrome bénin solitaire, est secondaire à un développement de fibroblastes. Dans environ 80 % des cas, elle est bénigne, mais peut être maligne dans les autres cas. Elle est rare et représente entre 5 et 8 % des tumeurs thoraciques. Son incidence est estimée à 2,8/100 000 habitants, et concerne avec la même fréquence les hommes et les femmes.
Le plus souvent, cette tumeur est observée chez les patients de plus de 50 ans (elle est exceptionnelle chez les enfants et adolescents). Il semblerait que l’incidence de cette pathologie soit majorée chez les patients ayant reçu une radiothérapie.
Lorsque l’atteinte est thoracique, dans près de 65 à 85 % des cas, la tumeur fibreuse solitaire touche la plèvre viscérale et dans 20 % des cas la plèvre pariétale. Cette tumeur peut également être observée au niveau cardiaque (péricarde), du foie, du pancréas, du rein, de la prostate, ou au niveau des méninges.
SYMPTOMATOLOGIE
Dans près de 50 % des cas, la tumeur fibreuse solitaire est asymptomatique. Parmi les manifestations cliniques les plus fréquentes, la dyspnée, dont l’intensité est très variable.
Le patient peut aussi se plaindre d’une douleur thoracique, une toux le plus souvent permanente, ou une hémoptysie. L’examen clinique peut retrouver un hippocratisme digital en rapport avec le syndrome paranéoplasique induit par une production importante d’HGF (Hepatocyte growth factor). Dans 5 % des cas, on observe une hypoglycémie liée à la sécrétion d’une substance insulin-like.
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
→ Imagerie La radiographie pulmonaire objective une opacité bien limitée. Le scanner thoracique est l’examen le plus utile : aspect hétérogène et polylobé de la masse tumorale avec, dans 5 % des cas, des calcifications associées. On note la présence (comme dans notre cas) d’un épanchement pleural dans 10 à 20 % des cas. L’IRM a un intérêt pour mieux préciser les limites de la tumeur (utile avant l’intervention chirurgicale), et met en avant son caractère fibreux.
→ Examen histologique Il permet de poser le diagnostic et évalue conjointement la gravité ou non de cette tumeur. On retrouve un développement anarchique assez dense de fibroblastes sans atypies, des vaisseaux ectasiques donnant un aspect d’hémangiopéricytaire-like (en bois de cerf).
En fonction des résultats obtenus, la tumeur analysée est classée en quatre types : pédiculée bénigne, sessile bénigne, pédiculée maligne, sessile maligne.
PRISE EN CHARGE
Elle est bien sûr différente en fonction du caractère bénin ou malin de la tumeur. Cependant, le traitement de référence demeure avant tout la chirurgie avec ablation complète et résection large de la lésion.
Pour les formes malignes, on effectue un traitement complémentaire avec de la chimiothérapie et/ou de la radiothérapie.
Dr Pierre Frances (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Thomas Cavailhès (interne en médecine générale à Montpellier), Chloé Liger et Chloé Lebreton (externes à Montpellier)
BIBLIOGRAPHIE
1. Chermiti Ben Abdellah F, Bousnina S, Racil H, et al. Tumeurs fibreuses solitaires malignes de la plèvre. Revue de Pneumologie Clinique 2010 ; 66 : 187-190.
2. Birebent J, Durliat S, Driot D, et al. Une tumeur fibreuse solitaire. Médecine 2018 ; 14 (4) : 164-165.
3. Amro L, Aït Batahar S, Alaoui-Yazidi A. Tumeur fibreuse de la plèvre : difficultés diagnostiques et particularités radiologiques et anatomopathologiques. Journal Africain du Cancer 2013 ; 5 : 232-236.
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