Monique, 81 ans, consulte car elle présente, depuis un mois, une toux et une réduction de son périmètre de marche.
Nous remarquons une dyspnée très importante (stade 3) et, sur un plan clinique, pas d’anomalie au niveau pleuropulmonaire.
En revanche, à l'auscultation, un léger frottement péricardique nous conduit à hospitaliser rapidement cette patiente. Le cardiologue met en évidence à l’échographie un épanchement circonférentiel péricardique abondant avec compression du ventricule et de l’oreillette droits.
Un drainage péricardique est rapidement effectué en raison d’un risque de tamponnade.
Une analyse cytologique permet de poser le diagnostic de péricardique secondaire à un adénocarcinome bronchique.
En parallèle, on note sur le scanner thoracique une lésion nodulaire au niveau du lobe supérieur du poumon gauche, laquelle a été identifiée comme un adénocarcinome bronchique suite à la réalisation d’une fibroscopie.
Un bilan d’extension avec PET scan a été effectué, lequel a permis d’identifier la présence d’une fixation au niveau du poumon gauche, du péricarde, et au niveau osseux (sternum, sacrum, bassin, corps vertébraux de C7, T1, T7, T12, L2 et L5) (cliché 1).
Monique présente une péricardite néoplasique due à un adénocarcinome bronchique.
INTRODUCTION
La péricardite représente près de 5 % des douleurs thoraciques non ischémiques. Au sein de la population générale, l’incidence est de 27,7 cas/100 000 habitants. En ce qui concerne le sex-ratio, les femmes sont plus impactées que les hommes (1,5 fois plus).
Parmi les différentes étiologies, nous retrouvons : péricardites idiopathiques (85 % des cas), infectieuses (7 % des cas), néoplasiques (6 % des cas), autres (2 % des cas).
Dans le cas des péricardites néoplasiques, le cancer pleuropulmonaire est l’étiologie la plus fréquente (entre 28 et 75 % des cas), le cancer du sein arrivant en seconde position.
SYMPTOMATOLOGIE
La péricardite néoplasique est généralement peu symptomatique, sauf en cas de tamponnade (épanchement péricardique compressif).
Dans ce cas, on objective une dyspnée d’effort avec des palpitations et, en cas d’absence de prise en charge rapide, des signes de décompensation cardiaque droite.
La tamponnade se caractérise aussi par le pouls paradoxal de Kussmaul. Normalement, il existe à l’inspiration, du fait de la réduction du volume du ventricule gauche, une réduction de la PA systolique (< 10 mmHg). Dans le cas d’une tamponnade, cette baisse de la PA systolique est majorée (> 20 mmHg) à l’inspiration du fait d’une altération de la contractilité ventriculaire. À l’aspiration profonde, le pouls au poignet peut diminuer, voire disparaître.
D’autre part, le patient peut être agité et on remarque parfois une hyperthermie et des sueurs.
Une hypotension peut être observée, ce qui augure un possible arrêt cardiaque.
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
L’échocardiographie est l’examen de choix permettant d’objectiver : l’abondance de l’épanchement péricardique, sa distribution circonférentielle ou localisée, et sa composition.
L’ECG est peu spécifique dans ce cas mais, en cas de tamponnade, on met en évidence un microvoltage avec des ondes T plates ou négatives.
PRISE EN CHARGE
L’épanchement péricardique
Dans le cas d’un épanchement péricardique, la péricardiocentèse est la méthode privilégiée pour les épanchements péricardiques importants. Le drainage chirurgical est la technique la plus adaptée pour réaliser des biopsies au niveau du péricarde à but diagnostique et permet aussi, en cas de récidive, d’avoir une voie d’abord conservée.
La péricardectomie n’est effectuée que dans les cas de péricardite constrictive. Cette technique est très invasive (nécessité d’une sternotomie) et elle est très rarement effectuée.
L’origine de la péricardite néoplasique
La prise en charge dépend de la nature de la néoplasie responsable de l’épanchement. Le plus souvent, cette prise en charge repose sur une chimiothérapie et/ou, pour les cancers du poumon notamment, une immunothérapie. Il est important de souligner que l’atteinte péricardique est un facteur de mauvais pronostic dans le cas d’une néoplasie pulmonaire (médiane de survie comprise entre 1 et 10 mois).
Dr Pierre Francès (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Tara Chalaye (interne en médecine générale à Montpellier), Julie Aguilar et Victor Chenal (externes à Montpellier)
BIBLIOGRAPHIE
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