Pneumologie

La BPCO chez la femme

Publié le 23/03/2018
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Plus précoce et plus sévère que chez les hommes,la BPCO reste pourtant sous-diagnostiquée chez la femme.

J’EXPLIQUE

• La BPCO est sous-estimée chez la femme, alors que sa prévalence au stade II serait au moins égale à celle des hommes, surtout dans les pays où le tabagisme a augmenté chez la femme.
• C’est une pathologie chronique, résultant d’une interaction entre prédisposition génétique et facteurs environnementaux incluant le tabac et des aérocontaminants professionnels ou domestiques.
• La BPCO débute plus tôt chez la femme que chez l’homme (56 vs 67 ans), pour une exposition tabagique plus faible (48 vs 69 paquets/ années).
• Plusieurs mécanismes expliqueraient cette plus grande vulnérabilité féminine : une prédisposition génétique encore mal connue, une sensibilité plus marquée à l’inflammation systémique, un calibre bronchique plus petit. Le rôle des oestrogènes est contrasté : ils sont protecteurs, expliquant le peu de lésions emphysémateuses et l’accélération du déclin du VEMS à la ménopause, mais ils augmenteraient aussi la susceptibilité aux polluants environnementaux.
• Par rapport à l’homme, la BPCO se caractérise chez la femme par un emphysème moins marqué, mais un rétrécissement et une hyperréactivité bronchiques plus importants, ce qui se traduit cliniquement par moins d’expectorations mais plus de toux, de dyspnée, de fatigue, de surinfections et d’exacerbations.
• Pour un même VEMS, la dyspnée est plus importante, avec des exacerbations et des surinfections plus fréquentes, une fatigue importante, une tolérance à l’effort moins bonne. Le retentissement est ainsi plus sévère sur la qualité de vie et les relations sociales.

J’ALERTE

• À tabagisme égal, la dégradation respiratoire est plus rapide et plus grave chez la femme fumeuse, mais le bénéfice de l’arrêt du tabac est supérieur. Aux USA, au-delà de 40 cigarettes par jour, le risque de décès lié à la BPCO est plus élevé chez les femmes que chez les hommes. La survie des fumeuses est diminuée de 11 ans par rapport aux non fumeuses.
• Les femmes exposées aux autres aérocontaminants (industries du textile, exposition aux désinfectants ménagers, à la biomasse en particulier dans les pays émergents) ont un risque accru de BPCO. Ainsi, l’exposition aux désinfectants de surface majore le risque de 22 à 32 %.
• Les manifestations respiratoires associées aux aérocontaminants industriels sont souvent étiquetées asthme ou hyperactivité bronchique alors qu’il s’agit d’une BPCO, ou de formes intriquant asthme et BPCO. 

J'INFORME

• Le sur-risque de pathologies CV est moindre chez la femme. L’anxiété et la dépression (30 % en population générale) concernent la moitié des BPCO, mais pratiquement 2/3 des femmes pour 1/3 des hommes.
• La survie des femmes est moins bonne en cas de cancer du poumon associé à une BPCO.
• Le risque d’ostéoporose s’accroît pour tous, mais davantage chez la femme ménopausée ; d’autant qu’elle est sous corticothérapie inhalée et/ou orale au long cours.

JE PRESCRIS

• Le but du traitement est de diminuer les symptômes, prévenir la progression de la maladie, les exacerbations et les hospitalisations.
• Le traitement par bronchodilatateurs a la même efficacité chez la femme que chez l’homme, et mais aussi le même pourcentage de mauvaise observance et d’erreurs techniques dans l’utilisation des inhalateurs, qui sont à aborder à chaque consultation.
• Le sevrage tabagique est la mesure la plus efficace vis-à-vis du déclin de la fonction respiratoire et ses conséquences, et son bénéfice est supérieur chez la femme.
La réponse aux substituts nicotiniques serait moins bonne que chez les hommes, mais ils sont indispensables car les femmes ont une plus forte tendance à compenser le manque de nicotine par des aliments riches en sucre.
• L’efficacité du bupropion ou de la varénicline est identique dans les deux sexes.
• Le bénéfice apporté par la réhabilitation respiratoire est obtenu plus précocement chez les femmes.
• L’oxygénothérapie améliore davantage la survie des femmes que celle des hommes.

Bibliographie

- Groupe femmes de la SPLF (Société de Pneumologie de Langue Française) http://splf.fr/groupes-de-travail/femmes-et-poumon/

 - C. Raherison & al, « Existe-t-il des spécificités chez les femmes atteintes de BPCO ? », Revue des Maladies Respiratoires, Volume 27, Issue 6, June 2010, Pages 611-624

 

Dr Maia Bovard-Gouffrant, sur référence bibliographique de la société de pneumologie de langue française.

Source : Le Généraliste: 2828