I L est fréquent de demander des tests hépatiques à des patients qui ont des symptômes non spécifiques comme une fatigue, une douleur abdominale, une dyspepsie ou une perte de poids. Et, bien souvent, médecins et patients pensent que des tests hépatiques anormaux sont liés à une consommation excessive d'alcool. Dans quelle mesure et comment sont explorées des anomalies modérées ? Pour le savoir, une équipe de Nottingham a entrepris un intéressant travail qui est publié dans le « BMJ ».
Les auteurs ont recensé, au Queen's Medical Center de Nottingham, tous le adultes qui avaient des résultats anormaux à des tests demandés par leur médecin traitant entre le 1er janvier et le 30 juin 1995. Etaient considérées comme « anormales » des valeurs supérieures à au moins deux fois la normale pour les gamma GT, les ALAT ou les phosphatases alcalines.
Quinze mois plus tard, les dossiers de ces patients (donnés biochimiques, virologiques, histologiques et radiologiques) ont été revus. Ont été exclus de l'étude les patients qui étaient en cours de suivi hospitalier. Les autres ont fait l'objet de l'étude : on a contacté leur médecin traitant et étudié leur dossier ; ceux qui avaient des explorations incomplètes étaient contactés et on leur proposait un bilan.
Sur les 8 208 tests hépatiques demandés pendant la période de six mois considérée, on a identifié 933 patients ayant des résultats anormaux (497 avaient au moins un résultat supérieur à trois fois la normal et 142 au moins un résultat supérieur à quatre fois la normale). Des données exploitables ont été obtenues pour 873 de ces 933 patients (93,6 %).
Parmi ces 873 patients, 531 faisaient l'objet d'un suivi hospitalier. On s'est donc intéressé aux 342 restants ; parmi eux, 157 n'avaient été explorés que partiellement (n = 66 ; auto-anticorps, sérologie VHB et VHC, ferritine, échographie abdominale) ou pas du tout (n = 91).
Ces 157 patients ont donc été invités à passer des examens complémentaires, allant jusqu'à la biopsie si nécessaire (n = 101). Ainsi, chez ces 157 patients, on en a dénombré 97 (62 %) avec un diagnostic identifiable : maladie alcoolique du foie (42, dont 23 avec cirrhose), stéatose hépatique (26, dont 11 avec fibrose), cirrhose biliaire primitive (5), hémochromatose primitive (4), hépatite B (2), hépatite C (6), hépatite auto-immune (2), lithiase biliaire (2), cholangite sclérosante primitive (1), déficit en alpha-1 antitrypsine (1) et hépatite cryptogénétique (6).
« Souvent, les anomalies des tests hépatiques sont transitoires après consommation excessive aiguë d'alcool, maladie virale mineure ou réaction à un médicament. Les concentrations enzymatiques hépatiques qui sont élevées de façon chronique peuvent résulter d'une consommation élevée chronique d'alcool, d'une obésité (surtout chez l'homme) et d'un tabagisme (chez la femme) », rappellent les auteurs. « Comme les tests standards sont peu chers, la première étape devant un résultat anormal devrait être de répéter les examens après quelques semaines d"abstinence d'alcool si aucun autre diagnostic n'est évident. Dans notre étude, une résolution spontanée a été observée dans 38 % des cas. »
« Des anomalies persistantes nécessitent des investigations, car elles peuvent être associées à des maladies menaçantes potentiellement transmissibles et traitables, comme le montre notre étude. » Quelques-uns des diagnostics les plus importants peuvent être suggérés par une batterie de tests sérologiques : antigène de surface VHB, anticorps VHC, auto-anticorps, immunoglobulines et ferritine. « Un diagnostic précoce d'hépatite virale, d'hémochromatose, d'hépatite auto-immune et, possiblement, de cirrhose biliaire primitive, peut améliorer le pronostic. »
Derrière l'alcool
Certains des patients n'ayant pas eu de bilan ont été considérés, souvent à raison, comme ayant une maladie alcoolique du foie. « Il est important de noter que les alcooliques peuvent avoir d'autres maladies - par exemple hépatites B et C - et des travaux antérieurs ont montré que la biopsie hépatique peut détecter des maladies hépatiques non suspectées chez les patients qui ont une forte consommation d'alcool. » De plus, chez les sujets qui boivent trop d'alcool, des résultats anormaux peuvent signer des maladies hépatiques graves, y compris une cirrhose.
Paul Sherwood et coll. « BMJ » du 3 février 2001, pp. 276-278.
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