Activité du système nerveux autonome 

Un indicateur pronostic des pathologies du sommeil

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Publié le 06/06/2016
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Les troubles du sommeil sont un enjeu majeur de santé publique tant il est admis qu’un sommeil perturbé a des conséquences physiopathologiques en termes de qualité de vie, de problématique psycho-sociale mais également de morbi-mortalité.

On sait que le sommeil du sujet âgé se modifie physiologiquement avec le temps par une avance de phase (le sujet âgé se couche et se lève plus tôt) et une transformation de la microarchitecture du sommeil qui devient moins profond. La cohorte PROOF, initiée dès 2000 sous la responsabilité des Prs Jean-Claude Barthélemy et Frédéric Roche, tente d’évaluer de façon prospective la valeur prédictive de l'activité du Système Nerveux Autonome (SNA) et de son déclin, sur la survenue d'événements graves et cérébraux, et sur la mortalité toutes causes confondues, dans une population générale de sujets de 65 ans à l'inclusion (1). L’objectif général est de déterminer les séquences chronologiques du déclin de l'activité du SNA et par là même, de la survenue de conditions pathologiques, y compris des pathologies du sommeil, respiratoires ou non.

Une des trois principales plaintes

« En plus de la mortalité-morbidité cardiovasculaire, on s’est naturellement intéressé aux troubles du sommeil. En effet, la perte subjective de qualité du sommeil était l’une des trois principales plaintes spontanées des patients » explique le Pr Roche. L’étude sur cette cohorte a confirmé que l’altération de la régulation autonomique est prédictive de l’apparition de pathologies cardiovasculaires (notamment l’hypertension), du diabète non équilibré (altération parasympathique) ou encore de pathologies neurodégénératives affectant les capacités cognitives mais également le Parkinson. Même si le lien formel et causal entre l’altération de la régulation autonomique et les troubles du sommeil reste encore à mettre en évidence, il y a aujourd’hui des observations importantes. « On a constaté que les personnes avec une apnée du sommeil ont une altération marquée du SNA. On pense qu’il se passe quelque chose sur la répétition des épisodes apnéiques qui va finalement conduire à une baisse du tonus parasympathique et à une augmentation du tonus sympathique, d’abord nocturne puis diurne. Ceci aura au final une répercussion sur le plan cardio-vasculaire », explique le Pr Roche. On a également une altération plus importante du SNA (moins de contrôle parasympathique) chez les sujets qui ont une fragmentation du sommeil et chez qui Il n’y a pas ou peu d’approfondissement du sommeil durable.

Des conseils simples

Cet outil prédictif est intéressant mais il manque encore aujourd’hui des moyens thérapeutiques préventifs même s’il y a des développements de stimulateurs vagaux non invasifs. « La polypharmacologie du senior peut être néfaste pour sa balance autonomique », regrette le Pr Roche. Dans la mesure du possible, il faut rediscuter avec le médecin traitant de la pertinence des traitements en cours. Selon le spécialiste, Il faut encourager l’activité physique régulière qui permet la réactivation autonomique. « On a l’impression que plus les gens ont gardé une activité physique régulière tout au long de ce suivi de 15 ans, moins il y a une baisse de leur fonction autonomique. Il semble donc que l’on puisse freiner cette perte d’activation autonomique », précise-t-il. Restent des recommandations simples qui doivent être martelées par les médecins auprès des séniors : Il est conseillé de ne pas regarder le soir ni de s’endormir devant la télévision, d’éviter tout excitant, de se coucher et de se lever à heure fixe. En cas d’insomnie, le médecin doit préconiser de se relever, de ne pas regarder l’heure, de quitter la chambre et de s’occuper jusqu’à l’arrivée du prochain cycle de sommeil. Il vaut mieux également éviter la sieste si on a des difficultés à s’endormir le soir.

(1) https://epidemiologie-france.aviesan.fr/ccontent/pdf/(ObjectId)/88557_PROOF_Cohorte_en_population_g.pdf

Emmanuel Le Poul

Source : Le Quotidien du médecin: 9502