L E kava (ou kawa) est le rhizome d'une variété de poivrier ( Piper methysticum) qui pousse en Polynésie et qui est consommé dans le Pacifique sud sous forme de boisson narcotique (également appelée kava). Les lactones, principales substances du kava, sont considérées comme pharmacologiquement actives et sont vendues en Europe et aux Etats-Unis sous forme d'extraits standardisés pour combattre l'anxiété et la « tension ».
Dans le « BMJ », des Suisses rapportent l'histoire d'un homme de 50 ans, adressé à l'hôpital par son médecin traitant pour un ictère. Depuis un mois, cet homme est fatigué, a la peau « tannée » et les urines foncées.
Il n'a aucun antécédent particulier ; toutefois, c'est un sujet légèrement anxieux qui, pour cela, depuis deux mois, prend chaque jour de trois à quatre capsules d'extrait de kava (la dose maximale recommandée étant de trois capsules par jour), ce qui correspond à une dose de 210 à 280 mg de lactones.
Ce patient ne prend aucun autre médicament et ne boit pas d'alcool.
Ses transaminases sont à 60 (ASAT) et 70 (ALAT) fois la normale, ses phosphatases alcalines à 450, ses gamma GT à 691 UI/l (N 9-35), sa bilirubine totale et conjuguée à 279,2μmol/l et 212,3 μmol/l ; son TP est à 25 %.
Le patient est hospitalisé. L'échographie montre un foie discrètement augmenté de volume, mais ni ascite ni thrombose portale ; les tests sont négatifs pour les virus A, B, C, E, le VIH, le CMV et l'EBV.
Encéphalopathie stade IV, TP à 10 %
L'état du patient se détériore en 48 heures : il apparaît une encéphalopathie stade IV, il doit être intubé ; le TP baisse à 10 %.
Deux jours plus tard, on pratique une transplantation hépatique ; les suites sont sans problème particulier.
A l'examen macroscopique, le foie est atrophique, les veines sus-hépatiques et porte sont libres. L'histologie montre une nécrose extensive hépatocellulaire sévère et une infiltration extensive lobulaire et portale par des lymphocytes et des éosinophiles.
L'hépatotoxicité du kava n'est pas une totale surprise : on savait déjà qu'il est associé à une élévation des gamma GT (« Med Aust », 1988 ; 148 : 548-555) et un cas d'hépatite nécrosante récurrente a été rapporté (« Dtsh Med Wischr », 1998 ; 123 1410-1414).
« Chez notre patient, une relation entre l'ingestion de kava et l'insuffisance hépatique fulminante est supportée par la chronologie, les constatations histologiques et l'exclusion d'autres causes d'hépatite », estiment les auteurs, qui rappellent qu'une insuffisance hépatique aiguë ayant conduit au décès ou à la greffe a déjà été attribuée à diverses préparations à base d'herbe. « Ce cas, poursuivent-ils, illustre l'importance de s'enquérir de l'usage de produits en vente libre. »
Monica Escher et coll. (Genève).« BMJ » du 20 janvier 2001, p. 139 (« Drug point »).
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