Brève

Théâtre. Les damnés, un choc

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Publié le 06/10/2016
visuel  Damnés

visuel Damnés

Le théâtre a depuis 2 500 ans été un créateur de mythes qui ont nourri l’imaginaire des peuples. Au XXe siècle, Broadway à New- York servait de casting à Hollywood. Les succès sur scène étaient immédiatement recyclés sur les écrans de cinéma. Aujourd’hui, les scénarios de films cultes se mutent en pièces de théâtre. La Comédie-Française nous en donne une nouvelle illustration avec cette adaptation des Damnés. Le spectacle est un évènement et provoque un choc pour le spectateur. Il flirte avec le chef d’oeuvre sans toutefois l’atteindre. Certes, le spectacle d’Ivo van Hove est d’une grande puissance visuelle. Il exige un engagement physique, voire intime des comédiens comme on l’a rarement vu dans la maison de Molière. La troupe une nouvelle fois nous offre une belle leçon d’humilité et d’abnégation au seul service de son art. Cette grandeur et décadence d’une grande famille industrielle allemande sous le nazisme inspirée de la famille Krupp provoque l’effroi tout au long du spectacle. Les Atrides n’ont qu’à bien se tenir. Le recours à la vidéo ici ne relève pas du gadget moderne. Il permet au plus près de saisir les émotions, des moments, les corps hors champ. Dans le même temps, le spectacle n’est jamais hybride. C’est bien du théâtre, avec ces rituels, son chœur qui inscrivent ce moment dans le premier temps de cet art fugace. La prouesse est belle. Et renouvelle les codes. Pour autant si Ivo van Hove est un grand créateur d’images et de sons, cette descente aux enfers dans la turpitude et le crime imprime d’abord les sens du spectateur plutôt que mobiliser la réflexion sur le phénomène. Comme si le visuel et le sens de l’image portés ici au plus haut niveau devaient en épuiser le sens ou l’ambiguïté. On attend encore le grand texte contemporain écrit pour le théâtre…

 

Les Damnés d’après Luchino Visconti, Nicola Badalucco, Enrico Medioli, mise en scène Ivo van Hove, Comédie-Française, salle Richelieu jusqu’au 13 janvier 2017.


Source : lequotidiendumedecin.fr