Approche
1) Quelle doit être l’approche diagnostique initiale?
1.1)Le diagnostic positif de pancréatite est évoqué sur des arguments :
a) cliniques : douleur violente, épigastrique et/ou de l’hypochondre gauche, violente, volontiers transfixiante ou irradiant vers l’épaule gauche ;
b) biologiques : augmentation significative (plus de 3 fois la limite supérieure de la normale) de l’amylasémie ou de la lipasémie (plus spécifique).
1.2) Le diagnostic positif de pancréatite sera confirmé par un scanner abdominal, qui permet également d’apprécier le degré de l’atteinte pancréatique (nécrose ?).
1.3) L’échographie abdominale est surtout intéressante pour la recherche d’une lithiase vésiculaire.
1.4) Avant de parler de pancréatite non biliaire et non alcoolique, il est effectivement impératif d’éliminer avec certitude ces deux étiologies, puisqu’elles totalisent un peu plus de 80 % des causes (environ 40 % chacune).
a) Les arguments en faveur d’une étiologie biliaire sont :
– le sexe féminin,
– l’âge (plus de 50 ans), l’augmentation des ALAT (alanine aminotransférases [transaminases]),
– l’imagerie. Il faut cependant savoir que la première échographie peut être en défaut (présence de gaz, obésité). Il faut donc la répéter et aussi avoir recours, au moindre doute, à l’échoendoscopie.
b) Les arguments en faveur d’une étiologique alcoolique sont :
– le sexe masculin (8 fois sur 10),
– l’âge (40 ans en moyenne),
– une consommation d’alcool > 40 g/j,
– l’imagerie. Il faut cependant savoir qu’au début de l’évolution d’une pancréatite alcoolique le scanner peut ne montrer ni calcifications ni lésions canalaires. L’échoendoscopie est plus performante que le scanner dans les pancréatites alcooliques débutantes.
Evoquer
2) Il est deux causes de pancréatite qu’il faut toujours évoquer systématiquement.
Ces deux causes sont les étiologies métaboliques et médicamenteuses.
2.1) Les causes métaboliques doivent être détectées sur des dosages systématiques, qu’il faudra savoir refaire si besoin un à deux mois après la poussée de pancréatite.
2.2) Les causes métaboliques sont les suivantes.
a) Hypertriglycéridémie (généralement très élevée, en sachant qu’elle peut être induite par l’alcool).
b) Hypercalcémie (en sachant qu’elle peut être « minorée » par la pancréatite elle-même, puisqu’une pancréatite grave peut abaisser la calcémie [séquestration calcique au niveau de la cytostéatonécrose]).
2.3) Les médicaments sont assez rarement en cause.
a) Parmi les médicaments utilisés en gastro-entérologie, on peut citer l’azathioprine et les dérivés du 5ASA.
b) Une banque de données (Pancreatox) est disponible.
Tumeur
3) Il serait grave de méconnaître une cause tumorale.
3.1) Bien qu’il s’agisse d’une étiologie rare de pancréatite aiguë (moins de 10 %), en cas de pancréatite inexpliquée, il convient de rechercher une tumeur par l’imagerie : scanner, IRM, échoendoscopie (méthode la plus sensible).
3.2) La tumeur le plus fréquemment retrouvée est une TIPMP (tumeur intracanalaire papillaire et mucineuse du pancréas). Cette lésion sécrète du mucus qui obstrue les canaux pancréatiques et entraîne dilatation des canaux et pancréatite.
Famille
4) L’enquête familiale doit être systématique.
4.1) Il est toujours utile de s’intéresser aux antécédents familiaux.
4.2) Une enquête génétique n’est généralement envisagée que dans les circonstances suivantes :
– avant 40 ans pour la mutation CFTR (mucoviscidose), notamment en cas d’antécédents de bronchite à répétition ou chez un homme jeune stérile ;
– avant 20 ans pour la mutation PRSS1 (pancréatite chronique calcifiante héréditaire).
Autres causes
5) Autres causes de pancréatite nonA, nonB
Les autres causes de pancréatite sont rares. Elles peuvent être classées sous les 4 rubriques suivantes : anomalies anatomiques, dysfonction du sphincter d’Oddi, pancréatite auto-immune, causes infectieuses et parasitaires.
5.1) Anomalies anatomiques.
– Lorsque les examens habituels (échographie, scanner) ne permettent pas de diagnostic étiologique, on peut avoir recours à l’échoendoscopie et la cholangio-wirsungo-IRM.
– Les anomalies anatomiques susceptibles d’entraîner une pancréatite sont indiquées dans l’encadré 1.
5.2) Dysfonction du sphincter d’Oddi.
C’est une cause à ne retenir qu’avec prudence et rigueur.
Les arguments en faveur de ce diagnostic sont les suivants :
– antécédent de cholécystectomie,
– déclenchement possible par la prise de codéine,
– manométrie oddienne (indispensable).
5.3) Pancréatite auto-immune.
Les caractéristiques de la pancréatite auto-immune sont les suivantes.
Il s’agit volontiers d’hommes de plus de 55 ans, mais l’affection peut se voir chez des sujets jeunes.
Elle est isolée ou s’intègre à une atteinte multiviscérale (moins de 30 % des cas : cholangite sclérosante, maladie inflammatoire du tube digestif, Gougerot-Sjögren, thyroïdite...).
Une augmentation des gammaglobulines est habituelle. On retrouve parfois des autoanticorps (antinucléaires, antilactoferrine, anti-anhydrase carbonique de type II).
L’atteinte pancréatique est généralement diffuse, mais elle peut aussi prendre l’aspect d’une tumeur pancréatique.
Le recours à la biopsie est souvent nécessaire.
En cas de symptômes, l’effet favorable de la corticothérapie est un argument indirect en faveur du diagnostic.
5.4) Causes infectieuses et parasitaires.
Elles sont indiquées dans l’encadré 2.
Réponse
L’assertion 5.2) comporte une inexactitude. En effet, en cas de suspicion de dysfonctionnement du sphincter d’Oddi, plusieurs auteurs n’utilisent jamais la manométrie oddienne, car elle est la source possible d’une poussée de pancréatite aiguë, parfois grave.
Anomalies anatomiques
• Pancréas divisum*
• Anomalie de la jonction bilio-pancréatique
• Cholédococèle
• Pancréas annulaire
• Duplication duodénale
• Rate mobile
* Cause la plus fréquente, mais cependant controversée (5 % des sujets ont un pancréas divisum, mais tous ne font pas de pancréatite aiguë...).
Causes infectieuses et parasitaires
a) Virales Virus ourlien, virus coxsackie, entérovirus, hépatite A
b) Bactériennes Salmonelles
c) Parasitaires Ascaris
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature