ARTS
par JEAN-JACQUES LEVEQUE
C 'EST plusieurs milliers de tableaux italiens qui figurent dans les musées des régions françaises, et la part accordée au XVIIIe siècle y est suffisamment importante pour démontrer que le XVIIIe italien ne se résume pas à la production picturale de Venise.
De fait, chaque ville a ses habitudes, ses ateliers, ses vedettes, ses traditions. C'est moins une unité de style qu'une exceptionnelle virtuosité de l'époque. Ces peintres ont, en commun, le « buon gusto », le « bellisimo impasto », le « brio di pennello grande », le « spiritoso » qui fait le succès de certains d'entre eux au delà des frontières.
L'exposition propose aussi une lecture qui met en valeur le type de rapports qui se sont établis entre cette peinture et le public français et qui furent injustes auprès de certaines écoles, alors que celles de Bologne, de Rome et de Naples ont une faveur toute spéciale.
Cette ambiguïté, cette disproportion, est fort bien expliquée par la progressive maîtrise de son patrimoine artistique par la France au XVIIIe siècle, qui fête surtout les Romains (Pannini avec ses goûts « antiquisants », et Constanzi si sensible au classicisme) et les Vénitiens (Guardi, et Carlevarijs qui annonce Canaletto dans l'art de la « veduta », Pietro Longhi qui, lui, doit sans doute quelque chose de sa grâce à Watteau).
Par la diversité des uvres qu'elle propose, l'exposition permet de retrouver certains artistes italiens impressionnants, comme le Génois Magnasco et sa dramatisation théâtrale ; le Vénitien Marco Ricci et son paysagisme d'un grand souffle ; le Napolitain Solimena et son goût pour une mise en scène soulignant la gestuelle des figures.
Tiepolo figure en vedette dans un choix qui a le grand mérite de montrer que le siècle qui prend son nom n'est pas totalement dominé par lui, et joue la diversité. Un Tiepolo brillant dans son sens du décor et qui est ici à sa vraie place. Ce n'est certainement pas la plus importante. Il est un peu, dans notre mémoire, l'arbre qui cache la forêt.
Si elle ne peut prétendre à l'exhaustivité de l'histoire du XVIIIe italien, l'exposition traduit bien l'évolution du goût français pour la peinture de l'Italie dans toute l'étendue de son évolution, qui a connu d'autres grandes périodes parfois mieux représentées dans nos musées. Elle souligne des « manques éloquents », elle est rythmée par « de superbes temps forts ».
Les historiens, les amateurs qui furent sensibles à la peinture italienne ont certainement contribué à l'enrichissement des musées, et c'est à travers leur regard que l'on peut, dans une sorte de bilan, relire l'art italien du XVIIIe siècle. Une lecture muséale ? Elle est passée par les modes, les amateurs, les collectionneurs, les spécialistes. C'est une vision épurée de l'histoire de l'art d'un siècle qui fut fameux en France aussi.
Musée des Beaux-Arts de Lille. Jusqu'au 30 avril.
Un important catalogue édité par la RMN (diffusion Seuil).
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