Près d'une IVG sur deux dans le monde a lieu dans des conditions peu sûres

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Publié le 28/09/2017

Sur les 55,7 millions d'interruptions volontaires de grossesses réalisées chaque année entre 2010 et 2014 dans le monde, 25,1 millions, soit un peu moins de la moitié, ne sont pas réalisées dans des conditions conformes aux standards de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) selon une estimation publiée dans « The Lancet » à l'occasion de la Journée mondiale de l'avortement de ce jeudi 28 septembre.

Une écrasante majorité (24,3 millions) des IVG réalisées dans des conditions suboptimales ont lieu dans des pays en voie de développement, constate le premier auteur, le Dr Bela Ganatra, du département de la santé reproductive et la recherche de l'OMS, et ses collègues. Les auteurs estiment que 49,5 % des IVG pratiquées dans les pays en développement ne sont pas réalisées dans de bonnes conditions, contre 12,5 % de celles qui sont pratiquées dans les pays développés. Seuls le sud de l'Afrique, l'Asie de l'Ouest et du Sud Ouest présentent des taux d'IVG correctement réalisés supérieurs à 50 % – dans l'ensemble de l'Afrique, seulement 25 % le sont. Dans les pays développés, la quasi-totalité des IVG sont effectuées dans de bonnes conditions sanitaires, à l'exception notable de l'Europe de l'Est qui affiche un taux d'IVG non sûres de près de 20 %.

Le misoprostol de plus en plus utilisé

La définition apportée il y a 25 ans par l'OMS à une IVG « non sûre » est la suivante : « une procédure d'arrêt de grossesse réalisée par un individu n'ayant pas la formation nécessaire ou dans un environnement non conforme aux standards médicaux minimum ». Depuis, l'évolution des techniques, et notamment l'apparition de technologies plus accessibles comme des kits d'aspiration manuelle avec mifépristone et misoprostol (ou misoprostol seul) ont rendu la réalisation d'IVG dans de bonnes conditions plus accessibles, y compris pour des non personnels médicaux non-médecins.

Entre 2008 et la période couverte par cette nouvelle étude, les avortements par auto-administration de misoprostol, en dehors de tout contrôle médical, ont augmenté dans les pays où l'accès à l'IVG est restreint. Cette dernière solution, bien que non sûre, représente toutefois une amélioration comparée au recours à des solutions invasives sans supervision médicale qui constituaient auparavant la seule solution possible.

L'Afrique, lanterne rouge

L'étude divise donc les IVG non sûres en deux catégories : « peu sûres » (30,7 %, IVG pratiquée par un professionnel entraîné dans de mauvaises conditions, ou par une personne non formée mais recourant à une méthode peu risquée comme le misoprostol) et « très peu sûres » (14,4 %, personne non formée et usant d'une méthode dangereuse comme l'introduction d'objets). Cette stratification en 3 catégories permet de distinguer les régions où les risques sur la santé des femmes recourant à l'IVG sont les plus préoccupants : Afrique de l'Est, Afrique centrale et Afrique du Nord.

Parmi les facteurs qui expliquent les mauvaises conditions de réalisation d'une IVG, les auteurs citent l'existence de lois restreignant l'accès à l'IVG, le statut socio-économique de femmes et la stigmatisation existant autour de l'avortement. Ils notent aussi une corrélation entre le taux d'IVG correctement réalisées et l'accès à la contraception ou encore le niveau d'égalité entre hommes et femmes.

Les auteurs se sont appuyés sur des données empiriques issues de nombreuses sources : 16 enquêtes démographiques ou sur la santé reproductive menée dans 15 pays, les données officielles des 23 pays en mesure de les fournir, et 39 études menées dans 24 pays. Ils ont ensuite appliqué un modèle mathématique statistique. « Des efforts sont nécessaires pour améliorer l'accès à l'IVG dans des conditions sûres, surtout dans les pays en développement », concluent les auteurs qui déplorent le « manque de données empiriques ».


Source : lequotidiendumedecin.fr