Pour obtenir une greffe de rein, mieux vaut-être bac + 5 que pas bachelier du tout... Les patients atteints de maladies rénales les moins diplômés ont en effet moins facilement accès à la greffe de rein, selon une étude menée par l'Ecole normale supérieure de Paris, parue dans Population, la revue de l'INED. Le constat de ces inégalités d'accès aux traitements est étayé par deux enquêtes, celle des Etats Généraux du rein de 2012 auprès de 8.613 patients et celle Quavi-Rein 2011 concernant près de 3.000 patients suivis dans 21 régions d'un réseau épidémiologique. 72% des diplômés de niveau master obtiennent une greffe, soit près de quatre fois plus que ceux qui n'ont qu'un niveau d'étude primaire, selon la seconde.
"Contre-indications et différences de pathologies rénales (maladies génétiques, complications de diabète et d'hypertension artérielle...) influent pour partie sur l'accès à lagreffe, mais sans justifier toutes les inégalités observées", dit Olivier Godechot de Sciences Po, co-auteur avec Christian Baudelot de l'ENS et Yvanie Caillé de l'association de patients Renaloo de l'article de Population. "Même en tenant compte des différences de maladie des insuffisants rénaux et d'âge, les diplômés du supérieur continuent à avoir près de deux fois plus de chances d'accéder à la greffe que ceux qui n'ont qu'un niveau d'étude primaire", ajoute-t-il.
Plus dérangeant peut-être : Olivier Godechot soutient que l'essentiel de ce différentiel se forme lors des interactions entre médecins et patients qui conduisent ou non à être inscrit en liste d'attente de greffe. "Une fois inscrit sur liste d'attente les différences sociales disparaissent", précise-t-il.
Ainsi paradoxalement, "ce ne sont pas les plus riches qui coûtent le plus cher au système de santé, mais les plus pauvres", plus souvent dirigés vers un traitement par dialyses, plus onéreuses que la greffe, relève Christian Baudelot. Mais ils "restent malgré tout moins bien soignés", note le sociologue. "On est dans une situation idéale où le meilleur traitement, la greffe, est le moins cher. Il faut en profiter pour la développer" plaide-t-il, enfin. De fait, la Cour des Comptes soulignait en 2015 que les prises en charge les plus économes et répondant le mieux aux besoins des patients (dialyse à domicile et greffe) sont insuffisamment développées, au bénéfice de traitements onéreux (dialyse en centres). Elle a par conséquent préconisé de rééquilibrer le financement en faveur de la prévention et de la greffe.
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