Trouble des conduites alimentaires

Mieux vaut dépister en première ligne

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Publié le 07/05/2018
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Les troubles des conduites alimentaires (TCA) au sens large concernent environ 20 % de la population française. L’anorexie mentale, l’une des formes les plus graves a la mortalité la plus élevée des TCA. Sa prévalence atteint environ 1 % chez les jeunes femmes.

Dans tous les cas, « le dépistage associé à une prise en charge précoce dont on sait qu'ils améliorent nettement le pronostic, ne peut se faire que par les médecins généralistes », explique le Dr Mouna Hanachi qui exerce dans l’unité de nutrition clinique – TCA de l’hôpital Raymond Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine).

Selon elle, la forte demande de soins implique que l’on doit « augmenter significativement les structures de prise en charge très spécialisées, mais également que l’on sensibilise les médecins généralistes au repérage », sachant que notamment pour les anorexies mentales, « la moitié des patients ne sont pas dépistés en soins primaires ». Si dans la majorité des cas la prise en charge des TCA relève de l’ambulatoire, certaines d’entre elles ne peuvent se faire qu’en unité spécialisée, surtout lorsque le pronostic vital est engagé.

Manque de temps et de moyens

Bien que le rôle des médecins généralistes dans le dépistage et la prise en charge précoce des patients souffrant d’un TCA soit fondamental, le Dr Hanachi reconnaît « les limites » actuelles de ce système : « Une fois le trouble diagnostiqué, il y a en général encore besoin de deux à trois consultations avant que le patient accepte d’en parler. Il faut alors l’amener progressivement à consulter un psychologue ou un psychiatre ». Une séquence qui implique un temps de consultation important que « les médecins généralistes n’ont pas » et qui met en exergue « le manque de moyens » alloués au dépistage des TCA. Dans tous les cas, « une suspicion de conduites de purge doit conduire à rechercher des troubles ioniques telle une hypokaliémie pouvant entraîner des troubles du rythme cardiaque et mettre en jeu le pronostic vital », rappelle le Dr Hanachi.

Pour aider les généralistes à parfaire leurs connaissances, « la Haute autorité de santé (HAS) a publié en 2010 des recommandations concernant l’anorexie mentale tandis que celles sur la boulimie et l’hyperphagie boulimiques devraient paraître à la fin de l’année », explique le Dr Hanachi. Dans les premières, il est notamment conseillé de cibler le repérage sur des populations à risque : adolescentes, jeunes femmes, mannequins, danseurs et sportifs et sujets atteints de pathologies impliquant des régimes.

Plusieurs outils pour aider le généraliste

Les professionnels de santé qui soupçonnent chez leurs patients la présence d’anorexie ou de boulimie peuvent également utiliser des outils de dépistage, tels que le questionnaire SCOFF que « préconise » le Dr Hanachi, pour les aider à déterminer une tendance à un TCA. Simple à utiliser et facile à mémoriser, il comprend cinq questions courtes à poser en tête à tête avec le patient. Il suffit que deux réponses soient positives pour qu’il y ait forte présomption d’un TCA.

Enfin, le Dr Hanachi souhaite que les généralistes sachent qu’ils peuvent également « s’appuyer sur des réseaux tels que celui de la Fédération française anorexie boulimie (FFAB, ex AFDAS-TCA) qui dispose d’un annuaire national des lieux de prise en charge spécialisée ou le réseau TCA IDF qui dispose d’une permanence téléphonique anonyme d’information et d’écoute destinée aux patients et à leur entourage ».

Si le Dr Hanachi note que « la carence des moyens dont nous disposons pour le dépistage des TCA nous place derrière nos collègues allemands ou britanniques », elle reconnaît cependant que, sur ce point, « les choses avancent petit à petit ».

 

Anorexie-Boulimie-Info-Ecoute : 0 810 037 037

Benoît Thilliez

Source : Le Quotidien du médecin: 9663