L E rythme d'évolution des dépenses d'assurance-maladie enregistré au mois d'octobre (+ 5,8 %) se serait alourdi au mois de novembre et les résultats du mois de décembre ne devraient guère modifier la tendance. L'augmentation des dépenses aurait donc été l'an dernier bien supérieure aux 4,9 % prévus lors de la dernière commission des comptes de la Sécurité sociale. Une première estimation qui circule cette semaine situerait même entre 1,4 et 1,7 % le dépassement par rapport aux prévisions (soit une dizaine de milliards de dépenses de plus), ce qui porterait la progression totale des dépenses d'assurance-maladie pour 2000 à plus de 6 % (entre 6,3 et 6,6 %) pour un objectif fixé initialement à 2,5 %.
Le problème est le suivant : la dernière loi de financement de la Sécurité sociale a bien procédé à un « rebasage » de l'objectif des dépenses d'assurance-maladie pour 2001 en le fixant non pas par rapport à l'objectif de l'an dernier mais par rapport aux dépenses effectivement constatées à la fin 2000. Ce calcul s'est basé sur l'estimation - erronée - de la commission des comptes de la Sécurité sociale. Le montant de l'ONDAM pour 2001 (693,3 milliards) était donc censé représenter une augmentation de 3,5 % par rapport aux dépenses 2000. Les dépenses 2000 ayant été supérieures aux prévisions, l'ONDAM 2001 ne représenterait plus une hausse de 3,5 % mais une augmentation effective nettement inférieure, de l'ordre de 2 %. Un pourcentage trop faible pour pouvoir être respecté.
Inquiétude de la CNAM
Ce qui ne manque pas d'embarrasser les responsables de la Caisse nationale d'assurance-maladie qui devront, en attendant les résultats de la concertation engagée avec Elisabeth Guigou, présenter un premier « rapport d'équilibre » pour 2001 dès le 15 février. Le directeur de la CNAM, Gilles Johanet, dans un entretien avec « le Quotidien » (20 décembre 2000) a déjà exprimé ses réserves à ce sujet. « Le seul intérêt du "rebasage" était de donner une nouvelle base de calcul aux comptes. Or, si on a à la fois une mesure qui affecte la crédibilité de la maîtrise des dépenses de santé sans donner cette nouvelle base, alors on a décidément tout faux », avait-il estimé.
Désormais, plusieurs voies s'élèvent également au sein de la majorité de gestion pour s'interroger sur le bien-fondé du mécanisme de maîtrise des dépenses mis en place l'année dernière par Martine Aubry. « On est pour l'instant dans le flou le plus total. Non seulement nous n'avons pas d'objectif délégué (1), mais le rebasage n'aura pas servi à grand-chose et l'ONDAM risque de toute évidence de ne pas être tenu. La question se pose de l'opportunité de présenter ou non un rapport d'équilibre en février. Il faut que des décisions soient prises rapidement dans ce domaine », estime un des administrateurs de la Caisse.
En tout cas, les responsables de la CNAM, qui n'ont jamais caché leur scepticisme sur l'actuel mécanisme de maîtrise des dépenses, et notamment le dispositif de lettres clés flottantes, n'ont pas l'intention de rester passifs. Le président de la CNAM, Jean-Marie Spaeth, et son directeur, Gilles Johanet, devraient présenter d'ici à une dizaine de jours une plate-forme de propositions destinée à faire évoluer le système et qui constituera la contribution de la CNAM à la concertation voulue par Elisabeth Guigou.
(1) L'objectif délégué correspond à la partie de l'ONDAM dont la CNAM est chargée d'assurer la gestion et la maîtrise, c'est-à-dire essentiellement les honoraires des professions de santé et les transports sanitaires.
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