Des observations faites chez la souris

L'interféron-1, l'agent double au service du virus Zika

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Publié le 08/01/2018
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Crédit photo : Yockey et al., Sci. Immunol. 3, eaao1680 (2018)

Bloquer l'Interféron de type 1 (INF-1), un puissant facteur antiviral essentiel de la réponse immunitaire, serait-il la clé pour prévenir les effets sur le fœtus d'une infection maternelle par le virus Zika ?

Selon un travail publié dans « Science Immunology », il semblerait que cette protéine, et surtout son récepteur, joue un rôle fondamental dans le développement des complications fœtales qui vont de l'avortement spontané à des malformations graves (microcéphalies, déficit visuel et/ou auditif, épilepsie…).

Lors de travaux précédents, des chercheurs ont observé que l'IFN-1 est produit en grande quantité en réponse à l'infection par le virus Zika. La perte du récepteur de l'interféron IFNAR est par ailleurs liée à une plus grande susceptibilité à l'infection par le virus Zika.

Un effet paradoxal

Les chercheurs des universités de Yale et de Pittsburgh, et de l'institut médical Howard Hughes, dirigés par le Pr Akiko Iwasaki, ont croisé des femelles de souris n'ayant pas de gène codant pour IFNAR avec des rats n'ayant qu'une seule copie de ce gène. Leurs descendances étaient donc composées pour moitié de souris exprimant le récepteur, et pour moitié de souris ne l'exprimant pas. Les souris femelles ont ensuite été infectées par Zika au cours de la grossesse.

C'est alors que les chercheurs ont observé un effet pour le moins paradoxal : les fœtus ayant des récepteurs IFNAR fonctionnels développaient des complications et ne survivaient pas. Les fœtus ayant une déficience en IFNAR poursuivaient un développement normal, bien qu'ils continuent à être porteurs du virus.

En poussant leurs observations in vitro sur des cultures de placenta humain, les auteurs ont noté que l'activation de la voie de signalisation de l'INF-1 et du récepteur IFNAR provoquait des malformations du placenta, même en l'absence de virus Zika, et une anomalie du développement, avec notamment l'apparition de structures nodulaires. La voie de l'INF-1 serait ainsi une sorte de « Dr Jekyll et M. Hyde », luttant contre l'infection d'une part, mais en amplifiant les effets d'autre part.

Dans un commentaire associé à l'article, le Pr Helen Lazear et Rebecca Casazza de l'université de Caroline du Nord remarquent que l'activité de l'IFN-1 est nécessaire au cours de la grossesse pour assurer une immunité fœtale et maternelle, ce qui « pose des questions sur la manière d'exploiter ces nouvelles données dans le cadre de futures investigations », soulignent-elles.

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du médecin: 9629