L’avenir des psychothérapies

L’hôpital public comme lieu de formation

Publié le 17/12/2015
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Une formation théorique en psychopathologie de 200 à 400 heures et un stage clinique de 2 à 5...

Une formation théorique en psychopathologie de 200 à 400 heures et un stage clinique de 2 à 5...
Crédit photo : PHANIE

Le questionnement sur l’abord psychothérapeutique des soins en psychiatrie ne date évidemment pas d’hier, Philippe Pinel (1745-1826) fut probablement l’un des premiers aliénistes à tenter une thérapeutique par la parole sur les malades hospitalisés. Cependant, de tout temps la médecine a su faire mouche avec des mots nous rappelait Lacan, qui affirmait également que « de la psychothérapie, on en a toujours fait sans très bien savoir ce qu’on faisait, mais assurément en faisant intervenir la fonction de la parole ». N’oublions pas le sophiste Antiphon, qui avait su se faire connaître à Corinthe comme thérapeute par les mots, expert dans l’art du déchagrin.

Il aura suffi d’un fait divers pour que ces questions ressurgissent, poussant le législateur à préciser la définition et le statut du psychothérapeute.

La question du statut

En effet, en 2003, au cours d’un procès en lien avec le suicide collectif d’adeptes de la secte l’Ordre du Temple Solaire survenu en 1995, dont le gourou s’était proclamé psychothérapeute, le Dr Accoyer s’empara de la question du statut des psychothérapeutes, avec l’ambition légitime de protéger les patients de toute influence néfaste d’un thérapeute malveillant. Cela aboutit à la publication de l’article 52 de la loi de santé publique de 2004, avec son décret d’application publié seulement en 2010 (et modifié en 2012), régissant l’usage du titre de psychothérapeute.

Où en sommes-nous cinq ans plus tard ? Cet article 52 oblige quiconque entend se prévaloir du titre de psychothérapeute à s’inscrire préalablement au registre national des psychothérapeutes (auprès des ARS). Pour cela, le candidat doit pouvoir justifier d’une formation en psychopathologie clinique et d’un stage pratique, dont les durées dépendent de sa formation initiale. Les médecins psychiatres et les psychologues cliniciens sont dispensés totalement de toute formation complémentaire. Les autres médecins doivent avoir bénéficié de 200 heures de formation théorique en psychopathologie et de deux mois de stage clinique, tout comme les psychanalystes régulièrement inscrits dans l’annuaire de leur association ; pour les psychologues non-cliniciens, les deux mois de stage suffisent. Enfin les titulaires d’un Master en psychologie ou en psychanalyse requièrent une formation théorique de 400 heures et cinq mois de stage. Ces formations doivent être effectuées au mieux dans des établissements accrédités par l’ARS.

Bien évidemment, cette nouvelle législation ne résout pas complètement ni les questions de déontologie, ni les questions de la qualité de la formation théorique et pratique des psychothérapeutes, mais donne cependant une certaine garantie car elle oblige chaque praticien à se situer dans ce champ si vaste des psychothérapies.

Une transmission aussi bien pratique que théorique

Si, dans ses missions, l’hôpital public se doit de favoriser l’accès aux soins, il ne doit pas négliger l’accès aux soins psychothérapeutiques au plus grand nombre, vieux rêve freudien dont il tenta l’expérience en 1920 à la Polyclinique de Berlin.

Nous pensons aussi qu’il se doit de pouvoir assurer une formation pratique aux jeunes cliniciens, futurs psychothérapeutes. Certains hôpitaux psychiatriques se sont dotés de lieu de transmission de cette clinique, transmission aussi bien théorique que pratique. Par exemple, au Centre Hospitalier Sainte-Anne, au sein du Pôle XV-SHU-Addictologie, l’Institut Hospitalier de Psychanalyse assure des consultations ouvertes à tous, mais aussi accueille de nombreux stagiaires en formation de psychanalyste ou de psychothérapeute, notamment les étudiants du DU « Psychothérapies, des théories aux pratiques » de l’université Paris Descartes, organisé par ce pôle.

Psychiatre, psychanalyste, chef de service, hôpital Sainte-Anne, Paris

Dr Luc Faucher

Source : Bilan spécialiste