TOUTES LES études réalisées avec le paclitaxel (1, 2) étaient des études nord-américaines, et plus particulièrement deux études importantes* qui ont montré qu'en traitement séquentiel, après les anthracyclines, il apporte un discret bénéfice sur la survie sans rechute mais ce bénéfice n'était pas équivalent pour tous les sous-groupes de malades, certains semblant bénéficier davantage que d'autres du traitement. Ces deux études n'étaient pas tout à fait concordantes et un doute persistait d'autant plus qu'on pouvait se demander si ce n'était pas la durée du traitement, les malades recevant huit cycles au lieu de quatre, ou l'adjonction d'un deuxième produit qui intervenaient dans le bénéfice observé.
Les taxanes avaient été autorisés aux Etats-Unis mais pas en Europe.
Depuis environ un an, la situation a beaucoup évolué en France avec la publication des résultats de deux études utilisant le docétaxel.
L'étude Bcirg 001.
L'étude Bcirg 001 (3) est une étude mondiale (20 pays, 110 centres, 1 500 patientes) qui a comparé les effets de six cycles de docétaxel en association avec l'adriamycine et le cyclophosphamide (protocole TAC) à ceux du protocole FAC standard (5-FU, adriamycine et cyclophosphamide), de même durée. Un médicament est substitué à un autre, le docétaxel remplaçant le 5-FU, et la durée de traitement est la même, ce qui est déjà plus satisfaisant sur le plan méthodologique. Cet essai a montré une différence sur la survie sans rechute avec un gain de 28 % et sur la survie globale avec un gain de 30 % en faveur du bras utilisant le docétaxel : des résultats qui fournissent une preuve quasi évidente que le taxotere apporte une amélioration. Des discussions ont porté sur tel ou tel sous-groupe qui en bénéficiait plus ou moins, mais globalement, les résultats étaient positifs pour toutes les patientes.
L'étude Pacs 01.
La deuxième étude est l'étude franco-belge, qui a été présentée par le Pr Henri Roché au congrès de San Antonio, en décembre 2004. Cette étude Pacs 01(4) comparaît également des traitements de même durée, six cycles dans les deux bras : un bras qui comportait six cycles de FEC 100, le protocole habituel en France (5-FU, épirubicine et cyclophosphamide), contre un autre bras dans lequel les patientes recevaient trois cycles de FEC 100, suivis de trois cycles de docétaxel. Cette étude a inclu 2 000 malades et, avec cinq ans de recul, elle met en évidence un bénéfice en termes de survie sans rechute et de survie globale en faveur du docétaxel. Là aussi, des analyses de sous-groupes ont été effectuées qui montrent que les bénéfices les plus importants sont observés plutôt chez les femmes de plus de 50 ans et pour les cancers avec envahissement ganglionnaire faible (de 1 à 3 ganglions envahis).
Un autre bénéfice éventuel des traitements séquentiels : en diminuant la dose d'anthracycline reçue par la patiente, on espère diminuer le risque de survenue de problèmes cardiaques tardifs et de leucémies.
Ce sont donc quatre études importantes, comportant chacune entre 1 500 et 3 000 malades, qui conduisent à la même conclusion : l'adjonction d'un taxane améliore le pronostic par rapport à une chimiothérapie sans taxane. Notons que ces essais n'ont concerné que des patientes ayant un envahissement ganglionnaire axillaire prouvé.
Aujourd'hui, le paclitaxel et le docétaxel ont obtenu une AMM en traitement adjuvant du cancer du sein et vont être à la disposition des médecins.
Relativiser le bénéfice.
Dans toutes ces études, il faut relativiser l'importance des gains par rapport au bras témoin. Les études nord-américaines, notamment, avaient des bras comparateurs considérés comme faibles, donc le bénéfice était peut-être plus facile à mettre en évidence. Dans les études, avec le docétaxel, les bras comparateurs étaient plus forts. Dans l'étude Pacs 01, par exemple, le bras comparateur qui ne comporte pas de docétaxel permet une espérance de vie de 86 % à cinq ans, ce qui est déjà très important.
Une tolérance satisfaisante.
En termes de toxicité, l'adjonction d'un taxane ou la substitution par taxane n'ont pas entraîné d'effet délétère majeur. Pour éviter des problèmes de toxicité hématologique, notamment de neutropénie fébrile dans l'étude où le protocole TAC est utilisé, l'adjonction d'un facteur de croissance des neutrophiles est quasiment obligatoire (ce qui augmente le coût du traitement). Dans les autres études, la toxicité hématologique a été à peu près satisfaisante.
D'après un entretien avec le Pr Henri Roché.Institut Claudius Regaud, Toulouse.
(1) Henderson C. et coll. « J Clin Onco » 2003 ; 21 : 976-983.
(2) Mamounas E.-P., Bryant J., Lembersky B.-C. et coll. « Proc Am Soc Clin Oncol » 2003 ; 22 : A12.
(3) Martin M. et coll. « Breast Cancer Research and Treatment » 2003 ; 82, supplément 1 : A 43.
(4) Roche H. et coll. « Breast Cancer Research and Treatment » 2003 ; 82, supplément 1 : A144.
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