Depuis de nombreuses années, l’hormonothérapie est une pierre angulaire dans le traitement des patientes ayant un cancer du sein avec des récepteurs hormonaux positifs (RH+) et sans surexpression de HER2 (HER2-). Plus de deux patientes sur trois sont concernées, que ce soit en situation adjuvante ou métastatique. Malheureusement, la plupart des patientes finissent, en phase métastatique, par échapper au traitement hormonal en monothérapie. Depuis quelques années, de nouvelles molécules émergent qui, associées à l’hormonothérapie, permettent de contourner ces résistances.
Everolimus et anti-CDK
En 2012, l’essai BOLERO-2 (1) a montré, chez des patientes en échappement aux anti-aromatases, une amélioration significative de la survie sans progression avec la combinaison exemestane-everolimus par rapport à l’exemestane associé à un placebo : 6,9 versus 2,8 mois respectivement. Les effets indésirables les plus fréquents de l’everolimus, inhibiteur de mTOR d’administration orale, sont la mucite, l’asthénie et les pneumopathies interstitielles. En 2013, l’everolimus a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) en association et en cas d’échec aux anti-aromatases.
Plus récemment ont été développés des enzymes de régulation du cycle cellulaire fréquemment impliquées dans les processus tumoraux : les inhibiteurs de cyclin dependent kinases (CDK). Dans l’essai PALOMA-2 (2), 666 patientes, avec un cancer du sein RH+ HER2- métastatique ou non opérable, étaient traitées par letrozole-placebo ou letrozole-palbociclib en première ligne métastatique. Grâce à l’ajout du palbociclib au letrozole, la survie sans progression passait de 14,5 mois à 24,8 mois et le taux de réponse objective de 44% à 55%. La toxicité principale du palbociclib était hématologique avec 55% de neutropénies de grade 3 et 10% de grade 4, justifiant de fréquentes réductions de dose bien que la fièvre soit une complication exceptionnelle. Des thrombopénies et des anémies de grade 3/4 était également rapportées. Très peu de toxicités non hématologiques de grade 3/4 étaient observées.
Palbociclib et ribociclib
Pour les patientes ayant une résistance aux anti-aromatases, l’essai PALOMA-3 (3) a démontré la supériorité de la combinaison fulvestrant-palbociclib par rapport au fulvestrant associé à un placebo. Les patientes incluses avaient récidivé dans les 12 mois après la fin d’une hormonothérapie adjuvante ou progressé sous anti-aromatases. L’adjonction de palbociclib permettait d’allonger la médiane de survie sans progression de 4,6 à 9,5 mois, avec également une amélioration globale de la qualité de vie. Le palbociclib a ainsi obtenu en 2017 une AMM en association à un inhibiteur de l’aromatase en première ligne métastatique, ainsi qu’associé au fulvestrant en première ligne et plus chez les femmes prétraitées par hormonothérapie pour leur maladie avancée ou dans le cadre d’un traitement adjuvant en cas de rechute précoce.
Un autre inhibiteur de CDK 4/6, le ribociclib, a montré chez 668 patientes son efficacité en association avec le letrozole en première ligne métastatique dans l’essai MONALEESA 2 [4]. Lors de l’analyse intermédiaire à 18 mois, la médiane de survie sans progression était de 15,3 mois dans le bras placebo-letrozole et non atteinte dans le groupe ribociclib-létrozole. Le taux de réponse objective passait de 36% à 52%. Le profil de toxicité du ribociclib est globalement le même que celui du palbociclib. Il possède une AMM en association à un inhibiteur de l’aromatase en première ligne métastatique, mais n’est pas encore utilisé en routine.
Les progrès de l’hormonothérapie ont progressivement entraîné la modification des recommandations. Ainsi, l’hormonothérapie est aujourd’hui indiquée en première ligne métastatique sauf en cas de « crise viscérale aiguë », définie comme la présence de métastases viscérales, d’une dysfonction d’organe ou de symptômes faisant craindre une progression rapide de la maladie. Ces résultats ont amené à diminuer les indications de la chimiothérapie en première ligne, retardant l’introduction de la chimiothérapie sans perte de chance et avec une moindre toxicité, au profit des associations d’hormonothérapie et d’inhibiteurs de CDK.
Hôpital Paris Saint-Joseph
1. Baselga J et al. Everolimus in postmenopausal hormone-receptor-positive advanced breast cancer. N Eng JMed 2012;366(6):520-9
2. Finn et al. Palbociclib and letrozole in advanced breast cancer. N Eng J Med 2016 375(20):1925-1936
3. Cristofanili M et al. Fulvestrant plus palbociclib versus fulvestrant plus placebo for treatment of hormone-receptor-positive, HER2-negative metastatic breast cancer that progressed on previous endocrine therapy (PALOMA-3) : final analysis of the multicentre, double-blind, phase 3 randomised controlled trial. Lancet Oncol 2016;17(4):425-439
4. Hortobagyi GN et al. Ribociclib as first-line therapy for HR-positive advanced breast cancer. N Eng J Med 2016;375(18):1738-48
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