RISQUE ET RESPONSABILITE
I L est possible de déroger à l'obligation d'information en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé. De plus, selon les dires mêmes de Pierre Sargos, conseiller rapporteur de la Cour de cassation, le médecin conserve le droit de limiter l'information à donner à un malade, dès lors qu'il estime que la révélation de l'information sur le diagnostic, l'examen ou la thérapeutique peut être néfaste à ce malade. L'arrêt rendu par la Cour de cassation le 23 mai dernier vient confirmer cette possibilité.
En effet, un psychiatre sociétaire du SOU Médical a fait l'objet en 1995 d'une plainte civile pour défaut d'information de la part d'un de ses patients qui alléguait que, en ne l'ayant pas informé qu'il souffrait d'une psychose maniaco-dépressive dès 1987, le médecin avait commis une faute. Faute qui lui avait été préjudiciable puisqu'il n'avait pu formuler une demande tendant à l'obtention d'une pension d'invalidité qu'en 1990.
Un pronostic délicat
L'expert missionné ne retiendra aucune faute de la part de notre sociétaire. Selon lui, le diagnostic de l'affection avait été fait en temps voulu (1987). Le pronostic était alors impossible à préciser puisque seule l'évolution de la maladie sous traitement permettait de préciser la gravité et le caractère invalidant de la maladie. Enfin, l'expert rappellera qu'il était d'usage dans ce type de situation de faire preuve de prudence, compte tenu notamment des risques de suicide encourus si le diagnostic était révélé en période mélancolique ; comme il était aussi d'usage, compte tenu de l'alternance des phases mélancoliques et d'excitation maniaque dans ce type de cas, « de laisser évoluer le patient comme sa famille qui, devant les rechutes, la nécessité plus ou moins permanente de soins, vont s'interroger, mûrir et devenir capables de connaître une vérité dont les contours ne s'établissent que lentement ».
Jugeant que la non-révélation du diagnostic ne pouvait donc être considérée comme fautive dans le cas présent, les magistrats débouteront le patient de ses demandes, jugement qui sera confirmé par la cour d'appel en 1998. Le pourvoi formé contre cet arrêt sera également rejeté le 23 mai 2000. Après avoir rappelé que l'article 42 du code de déontologie médicale, en vigueur au moment des faits, énonce que « le médecin est autorisé à limiter l'information de son patient sur un diagnostic ou un pronostic grave, et ce pour des raisons légitimes et dans l'intérêt du patient », la Cour de cassation estimera donc que la cour d'appel avait pu décider que le psychiatre n'avait commis aucune faute, l'intérêt du patient justifiant dans le cas présent la limitation de son information quant au diagnostic.
Comme on l'aura compris, le recours à cette limitation « thérapeutique » de l'information, source de contentieux, doit cependant demeurer exceptionnel, la preuve de son bien-fondé demeurant toujours à la charge du médecin.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature