ON DISPOSE de différentes preuves d’un effet nocif du tabac sur le métabolisme du cartilage. A la suite d’études épidémiologiques liant le tabagisme et les lombalgies, des études chez l’animal et in vitro ont montré que des composants de la fumée de tabac ont un effet délétère sur le fonctionnement des chondrocytes au niveau des disques vertébraux : on constate une inhibition de la prolifération cellulaire et de la synthèse de la matrice extracellulaire.
Ces démonstrations ont entraîné des questions au sujet d’effets négatifs potentiels du tabac sur la fonction chondrocytaire au niveau des articulations.
S. Amin et coll. (Mayo Clinic) ont suivi, dans une étude prospective d’observation sans intervention, 159 hommes âgés souffrant d’une arthrose symptomatique du genou. A l’inclusion, puis à quinze mois et à trente mois, les patients ont eu une évaluation par IRM, pour mesurer l’épaisseur du cartilage aux articulations tibio-fémorale (zone médiane et latérale) et fémoro-patellaire.
De même, la douleur a été évaluée aux différentes étapes, par cotation sur une échelle visuelle analogique (EVA).
On trouve dans cette population de 159 hommes, 19 fumeurs (12 % à l’inclusion). Ces fumeurs sont en moyenne plus jeunes (62 ans d’âge, au lieu de 69 ans pour la population) et sont plus minces que ceux qui ne sont pas des fumeurs habituels (IMC de 28,9 comparés à 31,3 kg/m2).
Réduction du cartilage.
Après avoir réalisé des ajustements pour l’âge, l’IMC et les scores de cotation de l’état du cartilage à l’inclusion, on constate que les hommes fumeurs présentent un risque plus élevé que les autres d’avoir une réduction du cartilage à l’interligne tibio-fémoral médian et fémoro-patellaire (risque relatif de 2,3).
En outre, les fumeurs éprouvent davantage de douleurs, non seulement à l’inclusion (cotation de 60 versus 45 à l’EVA, p < 0,05) mais aussi au suivi (59,4 versus 44,3, p < 0,05). «Le tabagisme exerce un effet délétère sur l’évolution de l’arthrose du genou», concluent les auteurs.
L’arthrose du genou représente l’une des principales sources d’impotence chez les personnes âgées.
L’étude montre que le tabagisme ajoute au risque habituel lié à l’âge un risque supplémentaire, qu’il importe de faire connaître et que l’on peut réduire.
Le stress oxydatif.
Outre les effets constatés sur les modèles animaux, le tabagisme augmente le stress oxydatif, ce qui peut contribuer à la perte cartilagineuse.
Le cartilage n’est pas vascularisé ; il est approvisionné en oxygène par diffusion à partir du liquide synovial. Dans des articulations saines, la pression partielle en oxygène s’établit entre 50 et 60 mmHg (pression moindre que celle du sang artériel). Dans les articulations arthrosiques, la pression partielle en oxygène est réduite. Or le monoxyde de carbone libéré par la fumée de tabac produit une hypoxie, qui est, elle aussi, de nature à altérer le turn-over du cartilage et à empêcher la réparation des chondrocytes.
« Ann Rheum », 2007 ; 66 : 18-22.
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