Fond d'obstruction partielle chronique
La rétention aiguë d'urine survient le plus souvent sur un fond d'obstruction partielle chronique. L'hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) en est la cause principale, la rétention est plus rarement secondaire au développement local d'un cancer de la prostate, à un épisode de prostatite aiguë ou à un rétrécissement urétral.
La rétention aiguë d'urine n'est pas un accident rare : son incidence dans une population d'hommes suivis en urologie pour des troubles mictionnels modérés ou sévères et dont la prostate est significativement augmentée est de 7 % à quatre ans, soit 1,65 % par an (1). Il est admis qu'un homme de 60 ans dont l'espérance de vie est de vingt ans a une probabilité de 23 % d'avoir un épisode de rétention aiguë d'urine au cours des années qui lui restent à vivre.
Des facteurs de risque
Plusieurs facteurs de risque ont été identifiés : un âge avancé (> 70 ans), la sévérité des troubles mictionnels (pour un Ipss [score international des symptômes de prostatisme] > 7 le risque relatif est de 3,2), la faiblesse du débit maximal urinaire (< 12 ml/s), l'augmentation du volume prostatique, un taux de PSA élevé, un antécédent de rétention aiguë d'urine.
Après un premier épisode, le risque de récidive est très élevé : 56 % dans la semaine, 62 % dans le mois et 68 % dans l'année qui suit.
Des facteurs déclenchants
Il existe également des facteurs potentiellement déclenchants connus : une anesthésie, une infection urinaire compliquant une rétention vésicale incomplète, la prise de certains médicaments (anticholinergiques et molécules ayant des propriétés anticholinergiques [neuroleptiques, antihistaminiques...], vasoconstricteurs nasaux, alphasympathicomimétiques, morphine et dérivés morphiniques).
Un globe
Le diagnostic est établi au lit du malade par l'examen clinique qui met en évidence un globe vésical, masse hypogastrique tendue, convexe en haut et pouvant remonter jusqu'à l'ombilic. Cette masse est mate à la percussion, la palpation est douloureuse et augmente le besoin d'uriner.
En cas de doute diagnostique, l'échographie permet de confirmer la réplétion vésicale et le cas échéant, d'évaluer le retentissement de la rétention sur le haut appareil urinaire (dilatation des cavités pyélocalicielles).
L'urgence : drainer les urines
La rétention aiguë d'urine est une urgence qui impose un drainage vésical soit par sondage vésical, dont l'infection urétro-prostatique et l'épididymite aiguë constituent les seules véritables contre-indications, soit par cathéter sus-pubien, préféré en cas de prostatite associée, de traumatisme urétral ou de sténose urétrale. Il est contre-indiqué en cas de troubles de la coagulation, d'hématurie et de tumeur de la vessie.
Vidange lente
Quelle que soit la méthode utilisée, elle exige un ECBU sur les premières urines recueillies, une vidange lente et progressive de la vessie et aussi l'évaluation du volume du globe vésical.
Le drainage de la vessie est le plus souvent pratiqué en service d'urgence, souvent suivi d'une hospitalisation.
Un suivi à domicile peut s'envisager chez un patient en bon état général, qui ne présente ni déshydratation ni infection.
En revanche, une surveillance hospitalière s'impose quand on redoute un syndrome de levée d'obstacle ou en cas de complications surajoutées d'ordre infectieux ou hémorragique ou de retentissement sur le rein.
Une consultation urologique est indiquée dès les premiers jours qui suivent la rétention afin de définir la stratégie de prise en charge ultérieure.
La durée du drainage
La durée du drainage dépend du contexte clinique, de l'existence d'un retentissement sur le haut appareil, du volume du globe vésical ou de la chronicité de la distension vésicale.
Actuellement, en l'absence de complication surajoutée, il est préconisé de tenter un sevrage le plus précoce possible du drainage vésical.
En cas de drainage par sonde vésicale, lorsqu'un facteur déclenchant a été identifié, le retrait de la sonde peut être proposé dès la 24e ou 48e heure. En cas de cathéter sus-pubien, une épreuve de clampage avec mesure du résidu postmictionnel peut également être proposée dans les mêmes délais.
Différentes études ont suggéré l'intérêt d'un traitement adjuvant au sondage vésical par les alpha 1 bloquants afin de lutter contre la composante sympathique de la rétention aiguë d'urine et d'améliorer le taux de retour à des mictions spontanées après le retrait de la sonde.
Urgences urologiques, communication du Pr François Haab (hôpital Tenon, Paris), Urgences 2005.
(1) McConnell J. D., Bruskewitz R, Walsh P et coll. : « N Engl J Med », L'hypertrophie bénigne de la prostate.
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