M EME si, aujourd'hui, le traitement de la douleur est de plus en plus accepté des soignants, il reste encore tabou aux yeux des patients.
Le Dr Gilbert Desfosses, chef de service de l'unité de soins palliatifs à l'institut mutualiste Montsouris, en a fait la preuve lors du 1er colloque national de l'Association pour le contrôle de la douleur des patients, créée en 1999 par le sénateur Lucien Neuwirth pour promouvoir l'équipement des hôpitaux en pompes à morphine (« le Quotidien » du 26 octobre 2000).
La douleur acceptée
Il s'est notamment appuyé sur une enquête réalisée par le Comité de lutte contre la douleur du groupe hospitalier de la Pitié-Salpêtrière (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), en février 2000, sur 998 patients.
On découvre que 52 % des malades estiment que « l'on devient facilement dépendant des médicaments contre la douleur » ou qu' « il faut garder les médicaments pour une douleur plus forte ».
Ils sont encore 22 % à juger qu' « il est plus facile de supporter sa douleur que de supporter les médicaments contre la douleur » et que « si je parle trop de ma douleur, le médecin pourrait négliger le traitement de ma maladie ».
Autres chiffres saisissants : un peu plus de la moitié des patients (51 %) pensent qu'il faut savoir supporter sa douleur et 35 % qu'un « bon patient » évite de parler de sa douleur.
Face à ces idées reçues, le Dr Gilbert Desfosses insiste sur la nécessité d'établir un dialogue entre le corps médical et les patients. « Il faut avoir une attitude systématique de recherche de la douleur, explique-t-il. Il faut l'évaluer et la mesurer ». Car la prise en charge spontanée de la douleur satisfait les patients. Toujours selon l'enquête du Comité de lutte contre la douleur de la Pitié-Salpêtrière, 83 % des malades considèrent qu'on les avait écoutés et que l'on avait prêté attention à leur douleur.
Les malades ont évalué le niveau de leur douleur grâce à une échelle visuelle analogique (réglette) allant de 0 à 100. Parmi ceux qui ont souffert dans les dernières 24 heures (soit 55 % des personnes interrogées), 50 % avaient une douleur inférieure à 30 et 25 % une valeur supérieure à 50. Vingt-sept pour cent déclaraient souffrir depuis moins de 3 jours, 40 % de 3 jours à 6 mois et 34 % depuis plus de 6 mois.
La réaction des soignants face à la douleur, lorsqu'elle est révélée, est assez rapide. Pour ceux qui avaient demandé un traitement contre la douleur (34 % des patients ne l'ont pas fait), 53 % ont déclaré l'avoir obtenu dans les 15 minutes suivantes, 13 % dans l'heure. Mais 7 % ont dit ne l'avoir jamais reçu. Globalement, 30 % des patients déclaraient que leur douleur avait beaucoup diminué ou disparu.
Insistant sur l'importance du travail interdisciplinaire, surtout lorsqu'il s'agit de douleurs chroniques, le Dr Gilbert Desfosses a toutefois regretté la non-diffusion de la méthadone comme thérapeutique substitutive à la morphine, par exemple.
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