La langue française nous dit qu’on peut souffrir d’une maladie. Mais aussi, éprouver une grande douleur après la perte d’un être cher. Ainsi, la souffrance n’est pas uniquement une affaire de psychisme et la douleur, pas seulement physique.
« Il y a, en effet, du physique dans le psychique et vice versa. Nous constatons ce rapport psychosomatique lorsque nous sommes déprimés et alors davantage sujets aux maladies que lorsque le moral est bon », souligne le Pr Bertrand Quentin, maître de conférences en philosophie pratique (Paris-Est Marne-la-Vallée).
La prise en charge idéale est celle qui considère l’homme malade dans sa globalité et ne le réduit pas à sa pathologie somatique. Or, cela est souvent le cas lorsque l’on considère les personnes âgées malades. Pourtant, derrière leurs douleurs physiques, elles peuvent cacher des douleurs morales profondes : perte de prestige, baisse de l’estime de soi, tristesse et angoisse liées à l’isolement… « Lorsqu’ils viennent voir leur médecin traitant, les patients âgés espèrent - parfois secrètement - que celui-ci décèle et décrypte leur plainte morale. En effet, s’ils consultent ouvertement pour un motif somatique, ils veulent également que leur douleur morale soit écoutée, prise en compte », note le Pr Quentin.
Considérer l’humanité et de la dignité intrinsèque du patient
« Le degré de technicité de la médecine actuelle peut amener certains praticiens à oublier le patient dans ce qu’il a de plus simple : son humanité. Les médicaments sont utiles mais leur action peut être nulle s’ils sont utilisés seuls, dans l’unique but d’éradiquer la douleur physique, sans écouter le malade. Une expérience en soins palliatifs à l’hôpital Sainte-Perrine m’a montré à quel point la musicothérapie, par exemple, peut optimiser l’action des analgésiques sur des personnes en fin de vie, sensibles à la musique. Alors que prescrits seuls, ces médicaments avaient peu ou pas d’effets », précise le Pr Quentin.
Souvent considérées par la société comme non performantes, les personnes âgées estiment, qu’elles ne sont plus « dans le coup », qu’elles ne servent à rien. Comme si le fait de ne plus être utile à la société leur ôtait le droit de vivre et d’être respectées. « Il existe aujourd’hui, une véritable confusion entre la dignité sociale et la dignité intrinsèque de l’homme. Or, le fait d’être handicapé, fragile ou impotent n’enlève en rien la dignité de l’homme. Dans Fondements de la métaphysique des mœurs, Kant indiquait que l’homme doit toujours être pensé comme une fin en soi et pas seulement comme un moyen en vue de quelque chose. Le patient âgé ne doit pas faire exception à cette règle », conclut le Pr Quentin.
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