ON TROUVE LES CLA dans les aliments, essentiellement les produits laitiers et la viande bovine et ovine. Ces acides gras particuliers relativement rares sont produits naturellement par les ovins et les bovins. L'acide linoléique présent dans les fourrages est transformé dans le tube digestif des animaux, traverse la barrière intestinale et se retrouve dans les tissus. Il a été montré récemment que cette voie existe aussi chez l'homme. Mais les CLA peuvent aussi être obtenus par synthèse industrielle et sont introduits dans des compléments alimentaires.
Dans une alimentation normale, les Français en consomment en moyenne 300 mg par jour.
Les résultats de travaux expérimentaux ayant mis en évidence des effets potentiels anticancéreux, antiathérogènes, et une action sur la composition corporelle ont fait des CLA un sujet d'actualité. Des chercheurs ont ainsi observé un effet drastique sur la prise de poids dans un modèle de souris obèse. Alors que, sous régime standard, les animaux doublent leur poids en deux mois, cette croissance pondérale n'a pas lieu quand on ajoute un mélange isomérique de CLA à leur alimentation. Par ailleurs, des souris nourries avec 1 % de CLA présentent une diminution importante de leurs réserves adipeuses, mais celle-ci peut être accompagnée d'une stéatose et de la survenue d'une insulinorésistance. Plusieurs pistes sont envisagées pour expliquer ce phénomène, parmi lesquelles des effets directs sur le pancréas et une action via le facteur de transcription PPAR alpha.
Quatorze études cliniques.
Qu'en est-il chez l'homme ? La question mérite d'être posée dans la mesure où les CLA sont l'objet de « publicités élogieuses » et où certains sites Internet font état d'allégations « extrêmement puissantes », constate le Pr Besnard. Or, d'un point de vue nutritionnel, on ne peut pas faire d'extrapolation à partir des observations chez la souris. Celles-ci soulèvent tout de même le problème des risques potentiels de leur utilisation, notamment sous forme de complément alimentaire.
À ce jour, la littérature compte 14 études cliniques dont la métaanalyse est difficile, du fait de la grande variabilité des conditions d'expérimentation (durée, doses, IMC des participants...). Il est donc impossible de faire un bilan global fiable. Quelques leçons peuvent néanmoins être tirées des résultats de l'ensemble de ces études : les CLA n'ont pas d'effet sur la masse corporelle, diminuent la masse grasse abdominale (3 études sur 14), et la seule étude faite avec l'isomère 10 trans C12 pur met en évidence la survenue d'une insulinorésistance.
Enfin, si l'on raisonne en terme de santé publique, dans l'attente de données supplémentaires, le Pr Besnard plaide pour une remise en cause de l'utilisation des mélanges isomériques de CLA dans les compléments alimentaires. « Mieux vaut privilégier l'apport naturel de CLA dans l'alimentation », estime le chercheur. « Reste que les CLA vont devenir des ingrédients fonctionnels », ajoute celui-ci. Déjà, en juin dernier, un produit à base de CLA a été élu « Ingrédient minceur 2004-2005 » lors d'une conférence de la Société française des antioxydants et de l'International Society of Antioxydants in Nutrition and Health.
* Pr Philippe Besnard (école nationale supérieure de biologie appliquée à la nutrition et à l'alimentation, Dijon). Jonas 2005.
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