L 'EXISTENCE de cellules souches de l'épiderme « vraisemblablement » localisées dans les follicules pileux avait déjà été rapportée par plusieurs équipes, dont l'équipe INSERM de Yann Barrandon, qui publie aujourd'hui dans « Cell » les résultats de cinq ans de travaux.
Les chercheurs ont, en premier, lieu localisé ces cellules souches dans la partie supérieure du follicule pileux, dans une zone renflée de la gaine entourant ces follicules. Ce résultat a pu être obtenu grâce au couplage de techniques de microchirurgie et de biologie moléculaire, qui ont permis de fabriquer des follicules chimères. Dans des follicules pileux de souris ordinaire, une partie du manchon contenant les cellules souches a été amputée et remplacée par la partie correspondante, prélevée dans un follicule de souris transgénique exprimant la bêta-galactosidase. On rappelle que les cellules exprimant l'enzyme peuvent être colorées en bleu. Les follicules chimères ayant été greffés sur des souris athymiques, il a donc été possible de vérifier, d'une part, l'existence de cellules colorées, différenciées en kératinocytes, en cellules de glande sébacée et en cellules de follicules pileux, d'autre part, de retracer le parcours suivi par ces cellules au cours de leur différenciation.
Ainsi, quatre semaines après la greffe des follicules chimères, il a été possible d'observer, sur coupes histologiques, que l'essentiel des cellules colorées en bleu se trouve encore dans la partie haute, renflée, du follicule. A huit semaines, la migration a commencé : les cellules colorées se trouvent à la fois en bas, dans la région du bulbe, et en haut, le long de la gaine externe du follicule. Les premières s'engageront dans une différenciation folliculaire : à partir de la dixième semaine ; leur cellules-filles généreront le poil. Quant aux secondes, elles donneront naissance aux cellules de glandes sébacées, pour certaines, et aux kératinocytes, pour celles qui poursuivent leur migration vers la périphérie.
Cellules fonctionnelles
Dans un second temps, la capacité des cellules souches adultes à générer des follicules pileux fonctionnels, ainsi que des glandes sébacées et de l'épiderme, a été vérifiée. La zone du follicule contenant les cellules souches a été prélevée chez une souris adulte et implantée dans un embryon de souris, au niveau du dos. Et le développement de ces cellules en épiderme, puis en follicules pileux et glandes sébacées a bien été observé.
L'aspect des greffes chez les grands brûlés
Les applications de ces travaux concernent évidemment la dermatologie au premier chef. On peut imaginer de favoriser la cicatrisation, en stimulant la différenciation des cellules souches en épiderme. On peut également imaginer d'améliorer l'aspect des greffes de peau chez les brûlés. Ces greffes ne comportent ni follicules pileux ni glandes sébacées. Il s'agirait donc de favoriser une différenciation diversifiée.
Pour les applications dermatologiques - comme pour le marché porteur de la cosmétologie -, le problème est de comprendre le mécanisme par lequel les cellules souches s'orientent dans l'une des trois voies de différenciation possibles et d'identifier les facteurs moléculaires intervenant dans le processus de migration-différenciation. Ce travail reste à faire.
Protéger le poil dans les chimiothérapies
On note au passage que, outre les applications évidentes en dermatologie, la compréhension de ces mécanismes pourrait ne pas rester sans conséquences en cancérologie ; conséquences spécifiques à l'oncodermatologie, si l'on réussit à comprendre comment certaines cellules du follicule pileux se transforment en cellules carcinomateuses ; et conséquences beaucoup plus générales en cancérologie s'il se révèle possible de protéger les cellules souches du follicule pileux des effets des chimiothérapies.
H. Oshima et coll. « Cell » du 26 janvier 2001, vol. 104.
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