E N 1997, le Dr Charles Mérieux célébrait cent ans de lutte contre les maladies infectieuses.
La saga des Mérieux commence en effet avec la création en 1897 par son père, Marcel, élève de Pasteur, de l'Institut biologique. Charles n'a que 20 ans, en 1927, quand, après la mort de son frère aîné Jean, victime d'une méningite tuberculeuse, il se voit confier la branche vétérinaire de l'Institut ; il poursuit dans le même temps ses études de médecine et, en 1937, succède à son père à la tête de l'institut Mérieux. En multipliant les innovations et les initiatives, notamment dans la lutte contre la fièvre aphteuse animale, puis la polio, il va en faire une entreprise de dimension mondiale et jeter les bases de la virologie industrielle.
Le petit laboratoire, dont il a hérité, est ainsi devenu une société où travaillent 1 000 personnes quand, en 1967, il confie à son fils Alain la présidence de l'institut Mérieux, qui passera ensuite sous le contrôle de Rhône-Poulenc et est aujourd'hui intégré dans le groupe Aventis Pasteur.
La grande aventure du Brésil
Mais pas question de retraite pour Charles Mérieux. Cette même année 1967, il crée la fondation Marcel-Mérieux, qui mène des actions humanitaires dans le domaine de la médecine préventive. Et en 1974, il vit ce qu'il appellera « la grande aventure de sa vie » : en voyage au Brésil, en août, il prend conscience de l'ampleur de l'épidémie de méningite A qui y sévit et organise en quelques mois, l'institut Mérieux étant le seul à disposer du vaccin adéquat, la fabrication de 90 millions de doses, de quoi vacciner la population entière du pays ; en mars 1975, un pont aérien s'établit entre les usines Mérieux et le Brésil, et dix millions de personnes sont vaccinées en cinq jours à Saô Paulo.
Autre grande aventure, et sa dernière uvre, le laboratoire P4 de Lyon, dont il avait le projet en tête « depuis quarante ans » : le laboratoire P4 de haute sécurité biologique, inauguré en mars 1999 à Lyon et pour l'instant unique en Europe.
Malgré les épreuves qui ont jalonné sa vie (la disparition accidentelle de son fils Jean, la mort de sa femme, l'enlèvement de son petit-fils contre rançon, la mort dans l'accident de la TWA d'un autre petit-fils), Charles Mérieux n'avait jamais perdu sa ténacité et la passion dont il avait fait le titre de son autobiographie (« Virus passion », réédition en 1997 avec post-scriptum de « Virus de la découverte », publié en 1988).
Des qualités et une uvre auxquelles de nombreux hommages sont rendus. Jacques Chirac a exprimé sa « très profonde tristesse », en soulignant que Charles Mérieux n'était « pas seulement un grand médecin et un grand scientifique », mais « aussi un homme de cur et de générosité ». Le député-maire de Lyon, Raymond Barre, a exprimé le deuil de la ville, que Charles Mérieux « a servi avec intelligence et dévouement ». Et c'est peut-être Handicap International, elle aussi lyonnaise, qui lui aura rendu le plus bel hommage, avec cette phrase : « Le monde humanitaire lyonnais l'aurait volontiers cru immortel, indestructible, tant nous étions habitués à son indomptable énergie, sa jeunesse et sa créativité de tous les instants. »
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