JAZZ-ROCK
PAR DIDIER PENNEQUIN
C ERTES, il faudra longtemps pour effacer de la mémoire des jazzmen les standards américains, dont la plupart viennent d'opérettes, de comédies musicales ou de musiques de films. Car à l'exception d'« Autumn Leaves » (« les Feuilles mortes »), rares sont les compositions issues du répertoire français à être entrées dans les classiques du jazz d'outre-Atlantique. Si les jazzmen hexagonaux ont toujours eu un faible pour notre patrimoine chanté, c'est, en ce début de siècle, à un Franco-Américain, le jeune pianiste Jacky Terrasson, que l'on doit la mise en valeur de certaines de nos plus belles et grandes chansons.
« J'ai voulu reprendre les mélodies françaises de mon enfance et les traiter comme des standards », a déclaré le pianiste au « Quotidien du Médecin », à l'occasion de la sortie de son dernier CD, « A Paris » (Blue Note/EMI), qui regroupe notamment des thèmes aussi connus que « Plaisir d'amour », « A Paris », « Jeux interdits », « La vie en rose », « Ne me quitte pas » et... « la Marseillaise », dans des versions très jazzy, bluesy et remplies d'un swing totalement inattendu.
« Il y a beaucoup de mélodies qui sont très fortes et font partie du patrimoine national. En ce qui me concerne, je les ai approché comme des standards, en les transformant », a-t-il ajouté. Concernant la reprise de « la Marseillaise », Jacky Terrasson a reconnu que, « sans l'élément rythmique de marche et les paroles monstrueuses, "la Marseillaise" est une très belle mélodie, porteuse et forte ». « Je ne sais pas si ce sont là les standards de demain, mais pour moi, ce disque est un album de standards français qui pourraient bien servir de base à de futures improvisations et développements musicaux », a-t-il admis.
Pour mener à bien cette entreprise, qui à mis cinq ans avant de voir le jour, le pianiste s'est adjoint le concours de complices de premier ordre comme notamment : Stefano Di Battista (saxes), Biréli Lagrène (guitare), Stefon Harris (vibraphone), Ugonna Okegwo et Rémi Vignolo (basse) ou Leon Parker (batterie, vocal). Une tournée est prévue en France au printemps-été 2001.
S'il est un musicien français qui se bat depuis des décennies pour la reconnaissance internationale de nos plus belles compositions, c'est bien Claude Bolling. L'infatigable pianiste-chef d'orchestre-compositeur-arrangeur, âgé aujourd'hui de 70 ans, a publié récemment « Paris Swing » (Milan Music/BMG), un CD où, à la tête de son merveilleux Big Band, il a aussi choisi de marier le jazz et le swing à des succès comme par exemple « la Mer », « C'est si bon », « Il est cinq heures, Paris s'éveille », « J'ai deux amours », « Ménilmontant » ou encore... « la Marseilaise » ! Trénet, Scotto, Gainsbourg, Lai, Nougaro, Salvador, Lemarque, voire Jonasz, sont ici les compositeurs-auteurs revisités avec toute la force d'une sacrée machine à swing. Le tout augmenté par un livret très explicatif sur les origines de chacun des thèmes sélectionnés, dû à la plume d'un spécialiste du genre, Jean-Christophe Averty.
Les frères Moutin - Louis (batteur) et François (contrebasse) -, à la tête de leur quartette Moutin Réunion (Sylvain Beuf, saxes, et Baptiste Trotignon, piano), ont également voulu explorer une partie du patrimoine chanté français dans leur dernier CD, « Power Three » (Shaï/Sony Music). Reprises de thèmes de Georges Brassens, « Je m'suis fait tout petit », plus un pot-pourri, et Louiguy, « La Vie en rose », complètent un fort agréable et intéressant album, incluant pour le reste des compositions originales des principaux leaders. Une autre approche mais toujours autant d'hommage.
Les « Olym-Piaf » d'Edith
E MI vient de publier un florilège de quatre CD, intitulé « Edith Piaf. Face à son public », qui regroupe sept tours de chant historiques, donnés au cours des neuf dernières années de la vie de la môme Piaf.
Née Edith Giovanna Gassion, Edith Piaf, de son nom de scène, est morte en octobre 1963 à l'âge de 49 ans, après une vie d'artiste légendaire et une vie personnelle des plus chaotiques. Ce coffret réunit les tours de chant donnés à l'Olympia en 1955, 1956, 1958, 1961 et 1962, à Bobino, des extraits d'un concert donné à Lille (deux chansons) et, surtout, son dernier récital du 9 janvier 1963 à l'Alhambra de Paris, quelques mois avant sa disparition tragique. Seul concert inédit jusqu'à présent, proposant un répertoire dû à la plume de Francis Lai, Florence Véran et Théo Sarapo, son dernier grand amour.
En tout, 71 chansons sont proposées, dont l'unique enregistrement en public d'un de ses tubes, « Emportez moi ». Parmi les autres succès figurent bien entendu « La Foule », « Milord », « Non, je ne regrette rien » ou encore « Mon manège à moi », dont l'écriture et la composition sont respectivement de Michel Rivgauche, Georges Moustaki, Charles Dumont ou Jean Constantin.
Outre ces thèmes devenus des standards de la variété française de haute qualité, il faut aussi prêter une oreille attentive à des interprétations moins connues, comme « les Grognards », dans laquelle Piaf récite certaines des victoires napoléoniennes.
Cette sortie permet de faire revivre l'une des plus grandes tragédiennes de la chanson française, notre Billie Holiday à nous, entièrement possédée par son art, totalement dévouée à son public, au point d'en sacrifier sa vie personnelle. A la fois géniale et dramatique.
BLOC NOTES
Jean-Marc Jafet
Bassiste et contrebassiste, Jean-Marc Jafet a fait récemment un double retour très attendu sur la scène du jazz : tout d'abord au sein du Trio Sud - avec Sylvain Luc (guitare) et André Ceccarelli (batterie -, ensuite à la tête de sa propre formation pour la sortie d'un nouveau CD, « Douceur Lunaire » (RDC Records/Mélodie). L'instrumentiste, qui réside habituellement à Nice, sera entouré pour son nouveau concert, dans la capitale, par une belle bande de musiciens sudistes, plus un (ou une) invité surprise.
Sunside (01.40.26.84.41), les 9 et 10 février, 21 h.
Julien Lourau
Partageant son temps entre Londres et Paris, le saxophoniste Julien Lourau donne un rendez-vous mensuel à ses fans dans un des clubs des Halles de la capitale. L'ancien leader du « Groove Gang », qui propose toujours un jazz très rythmé et scandé, matiné de sons électriques, technos voire drum'n'bass, va délaisser un temps cette formule pour retrouver un style plus acoustique, avec, comme invité, le pianiste Pierre de Bethmann, dans un hommage à la musique de John Coltrane et Wayne Shorter. Un retour aux sources, en quelque sorte...
Sunset (01.40.26.46.60), 7 février, 21 h.
Stéphane Huchard
Batteur de l'Orchestre national de jazz (ONJ), récompensé par le prix du « Meilleur espoir pour un premier disque » lors des Django d'Or 2000, avec « Tribal Traquenard » (Blue Note/EMI), entendu récemment dans la formation binaire du pianiste Laurent de Wilde, Stéphane Huchard est devenu, en l'espace de quelques mois, un instrumentiste indispensable, réclamé dans tout l'Hexagone. Il sera à la tête de son nouveau quintette, comprenant une belle brochette de jeunes musiciens français particulièrement en vogue actuellement, comme le claviériste Pierre de Bethmann ou le bassiste Rémy Vignolo.
Sunset ( 01.40.26.46.60), du 8 au 10 février, 21 h.
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