Vaccination anti-HPV

Ce que change Gardasil 9

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Publié le 05/09/2018

Lancé officiellement mardi, le vaccin anti-HPV neuf valences (Gardasil 9, laboratoires MSD Vaccins) va-t-il changer la donne en matière de vaccination HPV ? « Ce n’est pas une révolution mais c’est un progrès indiscutable dans la mesure où il permet de couvrir 20 % de souches oncogènes supplémentaires », répond le Pr Daniel Floret, pédiatre et vice président de la commission technique des vaccinations.

90 % des génotypes oncogènes couverts

En plus des génotypes 6, 11, 16 et 18 déjà couverts par le Gardasil “classique” (Gardasil quadrivalent ou Gardasil q) ce nouveau venu cible les HPV oncogènes 31, 33, 45, 52 et 58. Il protège ainsi contre les virus responsables de 90 % des cancers du col de l’utérus, (versus 70 % avec Gardasil q), 80 % des lésions précancéreuses (vs 50 %) et 90 % des verrues génitales.

Sur le plan clinique, une étude randomisée a évalué spécifiquement l’apport de Gardasil 9 par rapport à Gardasil q en population féminine. Après un suivi de 8 ans, elle retrouve une diminution de 97 % des lésions précancéreuses du col de l’utérus, de la vulve et du vagin dues aux 5 génotypes additionnels. Un gain qui devrait permettre de faire diminuer les conisations et leurs conséquences notamment en termes de prématurité, souligne le Pr Jérôme Delotte (Nice), qui intervenait lors de la conférence de presse de lancement de Gardasil 9.

Faute de recul suffisant, aucune donnée n’est disponible par contre sur la prévention des cancers proprement dits.

Côté tolérance, ce vaccin fait l’objet d’une surveillance spécifique au niveau européen comme tout nouveau vaccin. Pour le moment, alors que près de 42 millions de doses ont déjà été distribuées à l’étranger, les données disponibles mettent en évidence un profil de sécurité satisfaisant, similaire à celui de Gardasil q en dehors de réactions locales un peu plus fréquentes.

Pas de différences majeures non plus en termes de coût. Alors que la HAS avait estimé que Gardasil 9 ne pouvait justifier d'un prix supérieur à son prédécesseur, il coûtera finalement 135,68 euros avec un taux de remboursement fixé à 65 %.

Une utilisation « prioritaire »

Quoi qu’il en soit, Gardasil 9 viendra se positionner « de façon prioritaire » par rapport aux vaccins de première génération indique le Pr Floret.

Dans son avis de février 2017, le HCSP recommande son utilisation pour les nouvelles initiations de vaccination, et ce dans toutes les indications du calendrier vaccinal en vigueur. Soit pour les filles de 11 à 14 ans, et en rattrapage jusqu’à l’âge de 19 ans révolus ; pour les hommes ayant des relations avec les hommes (HSH) jusqu’à 26 ans ; et pour les immunodéprimées jusqu’à 19 ans.

En pratique, la vaccination se fait selon les mêmes schémas qu’auparavant, avec une petite nuance chez les filles de 11-14 ans chez qui la seconde dose peut être réalisée 6 à 12 mois après la première injection (et non plus à 6 mois stricts).

À terme, Gardasil q devrait céder définitivement la place à son “petit frère”, même si le laboratoire s’engage à poursuivre sa commercialisation le temps nécessaire à la transition. Faute d’études d’interchangeabilité, il est en effet préconisé de ne pas switcher d’un vaccin à l’autre en cours de vaccination et tout schéma initié avec Gardasil q ou Cervarix devra être poursuivi avec le même produit.

Par ailleurs, il n’est pas recommandé de revacciner avec Gardasil 9 des patients ayant déjà bénéficié d’une vaccination HPV complète avec un autre vaccin. Compte tenu du gain d’efficacité attendu, « la question pouvait se poser, estime le Pr Floret. Mais une étude a démontré que chez les personnes déjà vaccinées, la réponse aux génotypes additionnels était moindre. »

Quel impact sur le dépistage ?

Autre interrogation : l’implémentation de Gardasil 9 aura-t-elle un impact sur le dépistage ? « Il est clair que ce vaccin qui va couvrir 90 % des génotypes oncogènes peut faire revoir la politique de dépistage », estime le Pr Floret. La HAS qui étudie actuellement de façon plus large les évolutions éventuelles du dépistage devrait se pencher sur la question et statuer sur la nécessité ou non d’instaurer des modalités spécifiques pour les personnes vaccinées.

Mais pour l’instant, « il ne faut surtout pas se dédouaner du dépistage surtout avec les couvertures vaccinales que l’on a aujourd’hui », insiste le Pr Delotte.

Car si la couverture vaccinale s’est légèrement améliorée, elle reste très faible, autour de 20 %. Pour les experts, la mise à disposition de Gardasil 9 pourrait être justement l’occasion de remobiliser sur cette vaccination.


Source : lequotidiendumedecin.fr