« La crise enfin a jeté une lumière crue sur ce que l’on avait lu 150 fois. Le dénominateur commun, c’est la question sociale, les inégalités. Exemple, on reçoit le 18 mars 2020 les éléments de surmortalité liés au Covid. Le département le plus touché est la Seine-Saint-Denis. C’est pourtant et de très loin le département le plus jeune de France. Or la mortalité Covid touche moins les jeunes. Se pose alors la question, aurait-on moins bien pris en charge les patients dans les hôpitaux de Seine-Saint-Denis ? Une enquête est diligentée qui révèle que les patients sont décédés avant d’arriver à l’hôpital. Lorsque vous êtes un chauffeur Uber, une simple toux ne vous fera pas consulter ou arrêter votre travail. D’autant que vous ne savez pas que l’assurance maladie a mis en place un dispositif pour les travailleurs indépendants. Se produit ensuite une dégradation, renforcée par les multiples déplacements effectués avec au final une décompensation rapide.
Comme l’a rappelé le président de la République à plusieurs reprises, la santé ne peut plus être décorrélée de la question sociale. Comment faire revenir les citoyens les plus éloignés du système de soin ? One Health, au-delà de ce qui a été dit, c’est aussi la prévention, la promotion de la santé. Avec les data dont on dispose, on peut aller vers cette population. Tout au long de cette crise, les inégalités sociales ont constitué le principal déterminant. Ce que l’on appelle en logistique, le dernier kilomètre essentiel, ce sont ici les premiers cent mètres pour arriver dans le système de santé.
Les autorités sanitaires doivent être garantes que les interfaces fonctionnent. Et de l’autre côté que les coalitions se mettent en place. Je ne crois pas que l’on parviendra à faire un magnifique jardin à la française d’organisations administratives correspondant à la volonté globale de One Health. L’histoire de la constitution des agences est liée à l’observation des trous dans la raquette de rapports de force établis au cours des vingt dernières années. On ne doit pas laisser le citoyen seul face à cette complexité. Cela suppose que les ARS avec leur dispositif de veille, arrivent à restituer ce que l’on sait. Mais cette pandémie nous oblige à accomplir une mission encore plus difficile lorsque l’on est une autorité, à savoir dire que l’on ne sait pas. Assumer l’incertitude, assumer de ne rien dire de définitif est contradictoire avec le système institutionnel. Mais il faut désormais l’assurer. Quant au second point, pendant la pandémie nous étions tous dans une mêlée. On poussait collectivement comme dans un match de rugby. Lors de l’ouverture des premiers centres de dépistage à Clichy-sous-Bois, l’assurance maladie est présente pour ouvrir des droits immédiatement, le préfet est également là mais aussi le maire qui a fourni les tentes. L’AP-HP réalise ces premiers prélèvements. L’ARS, les autorités départementales ont apporté leur aide. Pour réussir cette coalition les autorités administratives doivent admettre que seules, elles ne peuvent rien faire. Même dans une France encore très centralisée, on a besoin d’embarquer tous les acteurs. »
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