Associer la résection chirurgicale ou endoscopique pour améliorer la durée de survie
L E registre auquel s'est intéressé le Pr Hervé Gouerou a permis de suivre l'évolution de l'incidence et du pronostic du cancer de l'sophage dans le Finistère entre 1984-1994. Ce registre s'appuie sur des comptes rendus anatomopathologiques et sur des données figurant dans les dossiers d'hospitalisation ; les malades sont suivis à la sortie de leur hospitalisation par des médecins généralistes et spécialistes qui participent à l'enrichissement et à la diversité des données recueillies. Au total,1 769 patients ont ainsi pu être recensés entre 1984 et 1994, avec une forte prédominance masculine (92 % d'hommes et 8 % de femmes) ; l'âge moyen étant de 63 ans pour les hommes et 71 ans pour les femmes.
« L'incidence brute du cancer de l'sophage dans le département du Finistère est de 36,8 pour 100 000 habitants pour les hommes et de 2,9 pour 100 000 habitants pour la femme. C'est le taux d'incidence le plus élevé en France devant le département du Calvados avec 33,3 et 2,9, respectivement. »
Alcoolisme et tabagisme
« Ces chiffres confortent les données épidémiologiques antérieures objectivant une nette prépondérance du cancer de l'sophage en Bretagne et en Normandie ; la consommation excessive d'alcool et le tabagisme assidu sont les deux facteurs le plus souvent incriminés dans la genèse de ce type de cancer, mais d'autres facteurs sont probablement en cause. Dans les autres régions, l'incidence diminue », affirme le Pr Gouerou.
Si cette incidence est stable pour les hommes, elle augmente significativement pour les femmes, passant de 2,3/100 000 habitants entre 1984 et 1988 à 3,4/100 000 habitants entre 1989 et 1994. On observe parallèlement une augmentation des adénocarcinomes par rapport aux épidermoïdes. « L'explication serait une augmentation de la proportion des endobrachysophages », souligne le spécialiste.
Le pronostic à cinq ans en 1980 était de 3 %, quel que soit le traitement. Le pronostic 1984 et 1994 à un an est de 33,6 %, à trois ans de 14,3 %, à cinq ans de 9,3 %. « En scindant cette décennie en deux, on observe entre 1984 et 1988, une survie à cinq ans de 7,2 % et entre 1989 et 1994, de 11 %. Cette amélioration de la survie globale est surtout liée à de meilleurs traitements ; en effet, l'année 1988 marque le début de l'entrée de la chimioradiothérapie concomitante, comme traitement adjuvant à la chirurgie ou traitement de première ligne des patients non opérables, des cancers de l'sophage », explique le Pr Gouerou.
Il existe aussi une différence de survie entre les patients opérés (40 % des cas) et non opérables (60 % des cas). L'inéligibilité des patients à la chirurgie peut être liée soit à l'extension de la maladie (stade IV, présence de métastases, adhérences multiples), soit à des contre-indications respiratoires et/ou hépatiques.
Des études randomisées
De 1984 à 1988, la survie à cinq ans des patients opérés est de 11 % et de 20 % entre 1989 et 1994 ; ce bénéfice en termes de survie à cinq ans n'est pas observé dans le groupe des patients non opérables, alors qu'il existe et qu'il est significatif pour les survies à un an et à trois ans.
« Les résultats montrent que chez les malades opérables, le traitement combiné radio-chimiothérapie et intervention chirurgicale à visée curative (et non plus palliative) améliore le pourcentage de survie à cinq ans ; chez les malades non opérables stade IV, la destruction tumorale par voie endoscopique associée à la chimioradiothérapie donne une survie à cinq ans à 13,5 % contre 5,4 % par chimioradiothérapie seule ; la même constatation est faite pour les patients inopérables en raison d'une insuffisance respiratoire ou hépatique : 22,7 % dans le groupe traitement combiné versus 10,9 % radio-chimiothérapie seule », rapporte le spécialiste.
Ces constatations doivent inciter les médecins à mener des études randomisées pour évaluer les différents protocoles thérapeutiques.
(*) D'après un entretien avec le Pr Hervé Gouerou, Brest.
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