Dans la foulée du feu vert accordé par l'Agence européenne du médicament (EMA) à l'extension du vaccin anti-Covid de Pfizer aux enfants de 5 à 11 ans, le 25 novembre dernier, la Haute Autorité de santé (HAS) se prononce pour l'immunisation de certains d'entre eux : ceux à risque de formes graves et de décès, et ceux qui vivent dans l'entourage de personnes immunodéprimées ou vulnérables non vaccinées (stratégie de cocooning).
La pertinence de la généralisation de la vaccination à tous les 5 -11 ans fera l'objet d'un avis ultérieur, pris après une concertation avec les parties prenantes.
Bénéfice individuel pour 360 000 enfants à risques concernés
Selon la HAS, « le bénéfice individuel de la vaccination est établi pour les enfants de 5 à 11 ans ayant des comorbidités et qui sont à risque de formes graves et de décès, soit 360 000 enfants ».
Dans le détail, la HAS recommande dès aujourd'hui d'élargir la vaccination avec une posologie adaptée (de 10 µg, soit un tiers de la dose standard) aux enfants souffrant de maladies hépatiques chroniques, de maladies cardiaques et respiratoires chroniques (y compris l'asthme sévère nécessitant un traitement continu), de maladies neurologiques, d'immunodéficience primitive ou induite par médicaments, d'obésité, de diabète, d'hémopathies malignes, de drépanocytose et de trisomie 21.
La HAS recommande également d'inclure d'autres enfants à risque, même si les données scientifiques chez l'enfant sont encore limitées - mais consistantes pour les adultes. Il s'agit des enfants souffrant d'un cancer récent, d'une maladie rénale chronique, d'un handicap neurologique, etc. L'agence recommande aussi aux spécialistes d'organes et des maladies rares de proposer la vaccination au cas par cas s'ils estiment l'enfant particulièrement vulnérable.
Au-delà des cas pour lesquels le bénéfice individuel est immédiat, la HAS préconise de vacciner les enfants de 5 à 11 ans vivant dans l'entourage de personnes immunodéprimées ou vulnérables non protégées par la vaccination, au nom de la stratégie de cocooning.
Une incidence en augmentation, mais des formes graves rares
La HAS rappelle, pour expliquer sa décision, que les comorbidités représentent, comme chez l'adulte, un risque de faire une forme sévère de la maladie chez l'enfant, même si cela survient rarement. Selon l'étude Pandor, 21 % des enfants de 0 à 17 ans ayant souffert d'une forme sévère de Covid-19 pédiatrique présentaient des comorbidités alors que ces enfants ne représentent que 6 % de leur classe d'âge. Un premier travail conduit en Île-de-France, incluant 106 cas de syndrome inflammatoire multi-systémique pédiatrique (PIMS) au lien confirmé avec le Covid-19, a montré que 26 d'entre eux présentaient des comorbidités, lit-on.
En revanche, la HAS est plus prudente quant à une vaccination anti-Covid de tous les enfants des 5-11 ans, en dépit de l'augmentation récente de l'incidence dans cette tranche d'âge. Une fois l'infection déclarée, le risque de développer une forme grave chez l'enfant est près de 25 fois inférieur à celui des adultes, selon une étude américaine. En outre, les symptômes prolongés de Covid-19 (ou « Covid long ») chez les enfants ne persisteraient pas au-delà de 12 semaines, ce qui suggère qu'ils pourraient moins concerner les enfants et les adolescents que les adultes.
Néanmoins, depuis le 2 mars 2020, 781 cas de PIMS ont été observés en France, 318 ayant nécessité un séjour en réanimation et 199 en unité de soins critiques. Trois décès directement liés au Covid-19 ont été recensés chez les enfants âgés de 5 à 11 ans depuis mars 2020.
La généralisation soumise à concertation
La HAS et la Commission technique des vaccinations vont donc auditionner les parties prenantes pour éclairer le rapport bénéfice/risque individuel de la vaccination des enfants pour lesquels le risque de forme sévère ou de décès est faible au regard du risque possible de survenue d'effets indésirables rares (myocardites, péricardites). Seront également évalués les bénéfices indirects de cette vaccination sur les plans psychologique, social et éducatif ainsi que l'acceptabilité de la vaccination par les parents ou encore les enjeux éthiques dans un contexte où la couverture vaccinale (rappel inclus) n'a pas encore atteint un niveau optimal dans toutes les classes d'âge. Mi-novembre, les pédiatres, mais aussi l'Académie de médecine, estimaient qu'il n'y avait pas d'urgence à étendre la vaccination à tous les enfants. Quant au ministre de la Santé Olivier Véran, il a indiqué saisir le Comité consultatif national d'éthique, tout en assurant qu'une vaccination générale, si elle était actée, serait facultative. La campagne ne commencerait alors que début 2022.
D'ici là, devraient être publiées les données de vraie vie des différents pays ayant déjà ouvert la campagne vaccinale aux enfants de 5 à 11 ans, comme les États-Unis ou Israël, et non seulement les données sur quelque 2 000 enfants fournies par Pfizer à l'EMA ou à la FDA.
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