« CE N’EST pas différent de ce qui s’est passé pour l’AME (Aide médicale d’État). Cela a été fait d’une manière irresponsable pour des objectifs non rationnels », estime le Dr Arnaud Veïsse, directeur général du Comède (Comité médical pour les exilés). L’Assemblée puis le Sénat ont approuvé les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité. Les députés ont adopté le texte par 297 voix contre 193, les Sénateurs par 182 voix contre 151.
La vive opposition du Conseil national du sida, de la Société française de santé publique, de médecins engagés dans des associations (COMEDE, MSF, MDM, AIDES, COMEGAS) ou des syndicats et la mobilisation de plus de 1 000 médecins appelant à « l’accessibilité » n’y a rien changé. Le compromis sur lequel se sont accordés les parlementaires vise encore plus à durcir les conditions d’obtention du titre de séjour « étrangers malades ». Le droit au séjour est désormais conditionné à l’« absence » du traitement approprié dans le pays d’origine. L’autorité administrative peut cependant prendre en compte des « circonstances humanitaires exceptionnelles », après avoir recueilli l’avis du directeur général de l’agence régionale de santé. « La mobilisation des médecins a pourtant été exceptionnelle. Il y a eu une belle unanimité. Maintenant chacun ses responsabilités. Pour nous il était important que les termes du débat soient clairs. La loi a été votée, c’est de droit souverain du parlement », regrette le Dr Veïsse. Comme les autres associations, il entend continuer à se mobiliser pour défendre ceux qui risquent d’avoir encore plus de mal, « c’est un euphémisme » à se faire régulariser.
Une erreur.
Tout dépendra désormais de la manière dont sera appliquée la loi et de l’appréciation des médecins des ARS. « La déontologie médicale n’a pas été changée. Elle oblige à appliquer les principes de la continuité des soins et de la protection de la santé. Mais compte tenu du caractère ambigu de la formulation de la loi, il faut attendre pour voir », estime le directeur du Comède. Dans le dernier numéro de sa lettre, « Maux d’exil », le Comède questionne : « reconnaissance du droit au séjour, le chant du cygne ? » Une interrogation qui résume bien l’état d’esprit de ceux qui ont tenté de faire entendre lors des débats la logique sanitaire. Le Pr Jean-François Delfraissy, directeur de l’ANRS rappelle combien en termes de santé publique c’est une erreur : « Dans les pays du sud, il y a un accès au traitement de première ligne mais l’accès au traitement de deuxième ligne et a fortiori au traitement de troisième ligne n’est pas possible. C’est une perte de chance pour les patients ».
Lors de l’adoption du texte par l’Assemblée, le ministre de l’intérieur, Claude Guéant s’est réjoui : « Le titre de séjour "étranger malade" est conservé, conformément à l’esprit et à la lettre de la loi de 1998. Nous avons simplement voulu contenir les effets de la jurisprudence récente du Conseil d’État. Désormais, la rédaction est claire, responsable et humaine. Elle ne met pas en cause les circulaires diffusées en 2005 et 2010 par le ministre de la santé pour protéger notamment les personnes infectées par le VIH ».
L’opposition de gauche a affirmé son intention de déposer un recours auprès du Conseil constitutionnel. La sénatrice PS, Bariza Khiari a souligné : « L’article 17 ter condamne en pratique les étrangers car l’existence de traitement dans les hôpitaux riches des pays d’origine est loin de garantir leur accessibilité à tous ». La députée PS, Sandrine Mazetier, a, elle, stigmatisé un texte qui aura été « l’occasion de défaire notre pacte républicain ».
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