Le vaccin Covid russe, baptisé Spoutnik V, très décrié lors de son homologation par le président Poutine en août, affiche dans « The Lancet » un taux de protection élevé, à plus de 90 %, dans une analyse intermédiaire de l'essai de phase 3.
Le candidat du centre Gamaleya, appelé également Gam-COVID-Vac, était vertement critiqué pour son manque de transparence et un développement en dehors des normes internationales, la vaccination ayant été ouverte à des volontaires avant même les essais de phase 3.
Près de 20 000 participants à Moscou
Dans la publication, l'efficacité du protocole à deux doses du vaccin atteindrait 91,6 % contre les formes symptomatiques de Covid, est-il rapporté. L'étude menée chez près de 20 000 participants à Moscou fait état de 16 cas de Covid-19 dans le groupe vacciné (0,1 %, 16/14 964) par rapport à 62 cas (1,3 %, 62/4 902). L'essai, qui est toujours en cours, prévoit au final d'inclure 40 000 individus.
La tolérance semble bonne avec peu d'événements indésirables graves (0,4 % dans le groupe placebo et 0,2 % dans celui vacciné), la plupart des effets secondaires étant modérés à type de symptômes pseudo-grippaux, de douleurs au site d'injection et de faiblesse ou de baisse d'énergie.
Chez les sujets âgés, une analyse en sous-groupe chez 2 000 sujets de plus de 60 ans suggère que le vaccin est aussi efficace et bien toléré.
Un vaccin avec deux vecteurs adénoviraux
Le Gam-COVID-Vac est un vaccin en deux parties, qui inclut deux vecteurs adénoviraux : un adénovirus humain recombinant de type 26 (rAd26-S) et un autre de type 5 (rAd5-S). Dans l'essai, le protocole consistait en une injection de rAd26-S, suivie 21 jours plus tard par une dose booster de rAd5-S.
Les auteurs expliquent qu'utiliser un vecteur adénoviral différent pour le booster entraîne une réponse immunitaire plus puissante tout en minimisant le risque de développer une résistance du système immunitaire au vecteur initial.
Les deux vecteurs ont été modifiés de sorte d'exprimer la protéine Spike du coronavirus. Les adénovirus ont été modifiés afin de ne pas pouvoir se répliquer dans les cellules humaines et de ne pas entraîner de maladie.
Transmission et protection à long terme, deux inconnues
Dans une analyse plus fine, le vaccin a entraîné une réponse immunitaire robuste, qu'elle soit humorale (via les anticorps) ou cellulaire (via les cellules T). Seuls six des 342 participants inclus dans ce volet n'ont pas développé de réponse immunitaire après la vaccination.
Spoutnik V n'apporte pas davantage de réponses que les vaccins à ARNm sur la transmission, puisque seules les formes symptomatiques ont été comptabilisées et confirmées par PCR. Le suivi médian étant de 48 jours après la première dose, la protection à long terme n'est pas connue non plus. Le vaccin Gam-COVID-Vac doit être stocké à -18 °C, mais « une conservation à 2-8 °C est autorisée également », est-il indiqué dans un communiqué du « Lancet ».
Une production mondiale qui s'organise
Dans un éditorial associé à la publication, deux scientifiques britanniques, les Prs Ian Jones de l'Université de Reading et Polly Roy de la Faculté d'hygiène et de médecine tropicale de Londres, écrivent : « Le développement du vaccin Spoutnik V a été critiqué pour une précipitation insensée, des procédés accélérés et une absence de transparence. Mais le résultat rapporté ici est clair et le principe scientifique de la vaccination est démontré, ce qui signifie qu'un nouveau vaccin peut maintenant se joindre à la bataille pour réduire l'incidence du Covid-19. »
La Russie, qui a déjà exporté des lots de doses en Bolivie, en Biélorussie, en Argentine, en Serbie ou en Algérie, dit avoir reçu des précommandes pour plus d'un milliard de doses, mais elle n'est pas en mesure de satisfaire une telle demande. Plutôt qu'exporter, Moscou semble vouloir développer des partenariats de production avec des usines locales, comme c'est déjà le cas au Kazakhstan, en Inde, en Corée du Sud et au Brésil.
Le Fonds souverain russe, qui a participé à la mise au point et au développement du Spoutnik V, a annoncé le 20 janvier avoir entamé une procédure d'homologation auprès de l'Agence européenne du médicament (EMA). La Hongrie de Viktor Orban l'a fait séparément, dénonçant les lenteurs européennes. La chancelière allemande Angela Merkel, qui a proposé une aide allemande pour la procédure européenne, a évoqué une éventuelle « production commune ».
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