Le premier confinement, associé à la fermeture des établissements scolaires et à d’importantes restrictions de sortie, a affecté différemment les plus jeunes selon l’âge, le sexe, l’environnement et les conditions de vie et d’habitat, rapporte l’étude Confeado, publiée dans le « Bulletin épidémiologique hebdomadaire » (BEH) de Santé publique France (SPF).
Pour comprendre les facteurs associés à la résilience et à la santé mentale des enfants et des adolescents (9-18 ans) lors et au décours du premier confinement, un questionnaire en ligne a été soumis, entre le 9 juin et le 14 septembre 2020, à 3 898 jeunes (et à leurs parents), dont 81 sont pris en charge par la protection de l’enfance. L’étude a inclus une majorité de filles (69,1 %) et d’adolescents de 13 à 18 ans (79,1 %).
Une détresse psychologique corrélée aux conditions de vie
La santé mentale de ces derniers a été plus impactée que celles des plus jeunes. Ils ont notamment ressenti « plus de difficultés pour s’endormir que d’habitude (30 versus 27,2 % pour les enfants) » et « déclaraient plus souvent trop manger (25,1 versus 12,5 %) », est-il souligné. Le matin, ils étaient plus tristes (7 versus 2,2 %), préoccupés (10,8 versus 4,5 %), nerveux (13,1 versus 5,2 %) et fatigués (27 versus 10,5 %) que les enfants. Mais cette tendance apparaît comme « une évolution habituelle de la prévalence des troubles de santé mentale entre l’enfance et l’adolescence », est-il relevé.
Les filles ont par ailleurs été plus touchées que les garçons. Cela peut refléter un « stress perçu plus important » ou la manifestation de filles « plus enclines à l’expression des émotions », est-il indiqué. La répartition genrée des tâches au sein de la famille peut également jouer un rôle, les filles étant significativement plus nombreuses que les garçons (5,2 versus 3,2 %) à citer le fait de s’occuper de leurs frères et sœurs comme un point négatif du confinement.
Plus généralement, la détresse psychologique était associée aux conditions de logement (zone urbaine, absence de jardin ou d’accès à un extérieur, impossibilité de s’isoler), à la situation économique du foyer (difficultés financières et alimentaires, absence de connexion à Internet, etc.) et à ses caractéristiques (famille monoparentale, niveau d’étude des parents, etc.).
Ceux qui ont ressenti une détresse psychologique déclaraient par ailleurs plus souvent « un manque d’activités, une augmentation du temps passé sur les réseaux sociaux et les écrans, un sentiment d’être dépassé par rapport au travail scolaire, l’infection Covid-19 d’un proche et l’hospitalisation ». Leurs relations avec la fratrie étaient plus détériorées (29,7 versus 12,1 % pour ceux n'ayant pas ressenti de détresse), de même pour leurs relations avec leurs parents, parents d’accueil ou éducateurs/éducatrices (34,5 versus 8,9 %).
À l’inverse, « de meilleures conditions de vie, une composition familiale biparentale, un niveau de diplôme élevé des parents, un soutien social et l’exercice d’activités pendant le confinement étaient au contraire associés à un score plus élevé de résilience, est-il observé. La pandémie et le confinement ont donc aggravé les inégalités préexistantes ».
Le constat est plus nuancé pour les enfants pris en charge par la protection de l’enfance, qui sont restés auprès de professionnels dédiés. « Il est apparu qu’ils faisaient état de plus d’activité que les enfants en population générale, lit-on. Pour certains enfants, il semble que le confinement ait créé une dynamique favorable à une prise en charge soutenue et étroite par ceux qui les accompagnaient sur le quotidien ».
Des leviers de prévention
Cet état des lieux descriptif permet de dégager des leviers de prévention pour « orienter les politiques publiques », alors qu’est constatée « une augmentation, par rapport aux années précédentes, des passages aux urgences pour troubles de l’humeur (dont les troubles dépressifs) à partir de novembre 2020, et pour gestes suicidaires en février 2021 ».
Il s’agit ainsi d’apporter un soutien aux parents « par la proposition d’une aide sociale en ciblant les familles monoparentales et les quartiers défavorisés », de maintenir les activités périscolaires, les bibliothèques, les ludothèques et les possibilités de sortie, mais aussi de porter une attention accrue à certains élèves afin de « diminuer le sentiment d’isolement et éviter que les enfants et les adolescents ne se sentent débordés par les devoirs à la maison ». « Les politiques publiques pour promouvoir la résilience doivent intégrer des politiques sociales différenciées de lutte contre les inégalités sociales », insistent les auteurs.
Une réflexion serait également à mener sur « l’accompagnement des jeunes dont un proche a été infecté ou hospitalisé des suites du Covid-19, pour éviter que leur bien-être psychologique soit affecté ». Un premier pas pourrait être l’accès à l’information, notamment par la « démocratisation de dispositifs innovants » (vidéos ludiques à la télévision et sur les réseaux sociaux, ou de bandes dessinées sous forme numérique et papier).
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