« Il n’est pas question de mettre en doute le bénéfice des thérapeutiques maternelles tant durant la grossesse qu’au cours de l’accouchement », préviennent l’embryologiste Élisabeth Élefant (Trousseau, Paris) et le pédiatre Paul Vert (Nancy) dans leur rapport sur « les médicaments et l’adaptation néonatale : l’héritage médicamenteux ». Mais il est toutefois « certain que les études sur les effets de l’héritage médicamenteux ne sont pas fondamentalement différentes de celles qui évaluent les effets chez le nouveau-né de l’imprégnation par des drogues illicites voire par l’alcool ou la nicotine à la différence près qu’il y a, ou non, prescription médicale ».
15 % des enfants
Les auteurs du rapport rappellent que même si plus de 90 % des accouchements se font avec analgésie-anesthésie dans les pays « socialement et médicalement avancés », les situations individuelles sont « infiniment » variées et hétérogènes. En l’absence d’évaluation globale de l’incidence des troubles observés chez les nouveau-nés, les académiciens se réfèrent à des données spécifiques à certaines affections ou thérapeutiques. « À titre d’exemple, il y a environ 10 % de mères hypertendues et 6 % sous médicaments psychotropes. Indépendamment des médicaments de l’anesthésie-analgésie obstétricale, on peut estimer qu’environ 12 à 15 % des enfants naissent avec un héritage médicamenteux ».
Les pédiatres néonatalogistes confrontés aux troubles de l’adaptation ont pour principal « objectif d’y faire face », quoi que souvent « dans l’incapacité de différencier ce qui revient aux effets indésirables des médicaments ou à d’autres facteurs comme une asphyxie périnatale ou une immaturité ». Même s’il s’agit, dans la plupart des cas, de phénomènes transitoires, la pathologie induite est « habituellement résolutive, au prix d’une hospitalisation et d’un traitement approprié parfois lourd ».
Un site d’informations
Dans leur rapport, les académiciens décrivent les grandes fonctions pouvant être altérées par l’héritage médicamenteux : le système nerveux, la thermorégulation, l’adaptation circulatoire, la respiration, les fonctions digestives, les fonctions hépatiques et le métabolisme de la bilirubine, la fonction rénale et vésicale, l’hémostase et les troubles métaboliques. Ils présentent également, sous forme de tableaux, les effets fœtaux et néonataux par grandes classes pharmaco-thérapeutiques. Afin d’anticiper « l’interruption soudaine des échanges placentaires », les académiciens préconisent notamment de faire une évaluation de la morbidité néonatale d’origine médicamenteuse maternelle dans les maternités, les services de néonatalogie et les centres de pharmaco-vigilance.
Ils suggèrent également que des consultations de pharmacologie clinique et périnatale soient développées, en particulier pour les mères souffrant de maladie chronique, et que des dosages de médicaments administrés à la mère soient pratiqués devant des signes cliniques inexpliqués chez des nouveau-nés. Il faut que les professionnels concernés par la prescription de médicaments aux femmes enceintes soient sensibilisés à leurs effets délétères possibles en période néonatale et que les laboratoires pharmaceutiques signalent ces risques. Les académiciens proposent que les femmes enceintes soient informées des risques possibles consécutifs à l’automédication et qu’elles puissent consulter le site internet du centre de référence sur les agents tératogènes au même titre que les professionnels de la santé concernés (www.lecrat.org).
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