DEPUIS son retour en Arabie Saoudite, il y a deux ans, ce chirurgien n’a adressé qu’un seul patient en France. Parce que ce dernier y a de la famille et l’avait demandé. Tous les autres, ceux qui ont eu besoin d’une technique ou d’un équipement dont le Royaume ne dispose pas, il les a envoyés aux États-Unis.
C’est pourtant en France que ce praticien a appris la chirurgie vasculaire. Cinq années aux côtés des plus grands. « Quand j’opère, c’est façon Fabiani ou Koskas. Je suis l’élève de la France ». Aujourd’hui l’élève est déçu, et il le dit ouvertement. « Les contacts ne sont pas entretenus. J’ai appelé mes anciens confrères parisiens depuis mon retour, mais rien. Aucun n’est venu me rendre visite. J’ai voulu envoyer des étudiants se former à l’AP-HP, cela n’a pas été possible. J’ai proposé à l’INSERM une coopération en recherche, pas de réponse. Cela me fait mal au cœur car je sais que la médecine française est de qualité. Nos collègues en France ne comprennent pas qu’une coopération doit être complète ». Et de citer l’exemple de cet hôpital, à Washington, qui échange des médecins et organise des téléconférences hebdomadaires avec Riad.
Le Dr Philippe Aubry a mis en route le programme de formation médicale entre les pays du Golfe et la France. En quelques années, le programme a pris l’eau. L’an passé, l’Arabie a envoyé 218 médecins se former en Allemagne. Les États-Unis en ont reçu plus de 800. En France, ils n’étaient que… douze. « Les obstacles sont trop nombreux, déplore le Dr Aubry. La France a des cartes à jouer qu’elle néglige ». Le chirurgien saoudien partage son avis. « J’ai voulu me former un an de plus en France, l’Arabie aurait tout payé. Refusé! J’ai dû aller au Canada. Pourtant, les médecins saoudiens formés en France sont la clé ».
Embûches.
Même impression de bâtons dans les roues chez le Dr Ali Maqds, en stage à Paris pour se spécialiser sur l’épaule. Lui vient du Koweït. « On dirait que l’administration craint que nous restions en France. Alors que je compte les jours pour rentrer chez moi! ». Un boulevard l’y attend : il sera le 2e chirurgien du pays à savoir réparer les ruptures de la coiffe. Enverra-t-il les cas difficiles vers Paris ? Il assure que oui. « Je sais que certaines personnes de mon pays critiqueront les bâtiments, mais l’important, c’est d’être bien soigné ». En Allemagne, ajoute-t-il, il ne connaît personne.
Les médecins ne sont pas seuls prescripteurs. Chaque consulat, chaque ambassade a son carnet d’adresses. Sa liste des destinations recommandables. « L’Allemagne est reconnue pour l’orthopédie, indique l’ambassade d’Arabie Saoudite à Paris. En France, Necker prédomine pour l’enfant, l’Institut Gustave Roussy pour le cancer, la Pitié-Salpêtrière pour la prothèse du genou ».
Depuis la guerre du Golfe, la clinique Mayo, dans le Minnesota, a moins le vent en poupe, et le riche royaume se tourne vers l’Europe. Il finance les séjours clé en main. De l’argent sur un plateau, avec ses contreparties. « Nous acceptons les chambres individuelles standards, et les repas de l’AP-HP pour lesquels il n’y a pas de dérogation, reprend cette source diplomatique. La femme saoudienne qui demande un médecin femme, c’est un cliché. En revanche, nous exigeons du temps, de l’écoute. Et le meilleur soin ».
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