AU FIL des années, le calendrier français est devenu de plus en plus complexe et de plus en plus chargé avec, « jusqu’à 10 à 13 injections vaccinales avant l’âge de 2 ans », souligne le Pr Daniel Floret, président du Comité technique des vaccinations au Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Pour tenter de le simplifier, le HCSP s’est autosaisi en mai 2008. Il aura fallu 24 réunions et 3 ans de travaux (2009-2012) : revue extensive de la littérature, audition d’experts étrangers et nationaux, comparaison des calendriers de pays européens (Italie, Finlande, Suède et Danemark) pour que le nouveau calendrier voie le jour. Sa publication a été précédée d’une étude d’acceptabilité auprès de généralistes et de pédiatres. Réalisée en collaboration avec l’INSERM, cette étude a montré que les médecins étaient plutôt favorables aux nouvelles modifications même s’ils exprimaient quelques craintes quant au moindre suivi des vaccinations chez le nourrisson, à une moindre efficacité vaccinale et s’interrogeaient sur les difficultés d’adaptation chez les enfants déjà engagés dans le calendrier actuel.
Information des médecins.
Certains craignaient que des arguments financiers ne soient à l’origine du changement. L’avis du HCSP répond à ces inquiétudes et fournit les justifications scientifiques qui ont conduit à la simplification du calendrier. Les médecins ont aussi été informés en amont de la publication des nouvelles recommandations.
« C’est une réelle volonté de simplifier les choses, à commencer pour les médecins », explique le Pr Daniel Floret au « Quotidien ». Pour les nourrissons, la primovaccination se fait avec une injection en moins : deux doses de vaccin espacées de 2 moins et un rappel, au lieu de 3 doses et un rappel. Pour les enfants et les adolescents, le calendrier propose également une dose en moins : le rappel de vaccination entre 16 et 18 ans contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite est supprimé. Pour les adultes chez qui la « couverture vaccinale est très insuffisante », rappelle le Pr Floret, notamment en raison de la mauvaise application du rappel décennal pour la vaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. « Chez les adultes, nous sommes passés d’une logique d’intervalle que personne ne contrôle - ni le patient qui ne connaît pas la date d’administration ni la nature du dernier vaccin ; ni le médecin qui ignore le statut vaccinal du patient - à une logique d’âge. Les rappels sont désormais à âge fixe avec des délais augmentés parce que les durées de protection sont plus importantes que ce que l’on pensait, en tout cas beaucoup plus que dix ans », précise le Pr Floret. Au final, le calendrier « est beaucoup plus simple avec moins des doses de vaccins, moins de séances de vaccination et surtout, il fait en sorte qu’il n’y ait pas d’alternance avec toujours les mêmes vaccins et seulement deux par séance », commente le Pr Floret.
Pour le nourrisson.
Les nouvelles recommandations permettent une immunisation complète des nourrissons dès l’âge de 18 mois en 5 rendez-vous vaccinaux :
. Le schéma de primovaccination (diphtérie, tétanos, coqueluche avec le vaccin coquelucheux acellulaire, poliomyélite et infections invasives à Haemophilus influenzae de type b) comporte donc deux injections aux âges de 2 et 4 mois, suivies d’un rappel avancé à l’âge de 11 mois. Contrairement aux schémas suédois, danois, finlandais et italien, qui préconisent un premier vaccin à 3 mois, la France maintient à l’âge de 2 mois le début de la vaccination afin d’assurer une meilleure prévention des coqueluches précoces ainsi que des infections bactériennes graves à Haemophilus ou à pneumocoque.
. Les rappels contre l’hépatite B et contre les infections invasives à pneumocoque ont été avancés, selon le schéma de vaccination à l’âge de 2, 4, 11 mois.
. Tous les enfants doivent avoir leur première dose de vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) à l’âge de 12 mois, quel que soit le mode de garde, la seconde dose étant recommandée entre 16 et 18 mois. L’administration à l’âge de 9 mois de la première dose chez les enfants admis en collectivité n’a pas de justification en dehors des périodes épidémiques. De plus, le vaccin est moins efficace à cet âge. « En dehors des périodes épidémiques telles qu’observées en France entre 2008 et 2011, le risque de contracter la rougeole n’est pas plus élevé chez un nourrisson admis en collectivité que chez un nourrisson bénéficiant d’un autre mode de garde », précisent les recommandations.
. La vaccination contre les infections invasives à méningocoque de sérogroupe C est recommandée à l’âge de 12 mois (en coadministration possible avec la première dose de ROR).
Chez l’enfant et l’adolescent
. Un rappel contre la coqueluche à l’âge de 6 ans est désormais recommandé avec celui déjà prévu à cet âge-là contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite afin de renforcer la protection contre la maladie, ce d’autant que les vaccins acellulaires ont sans doute une efficacité moins bonne.
. Le rappel contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la poliomyélite doit être réalisé entre 11 et 13 ans avec désormais des concentrations réduites d’anatoxine diphtérique et d’antigènes coquelucheux (dTcaP) ; il peut être coadministré avec l’une des 3 doses de la vaccination contre les infections à papillomavirus humains (HPV) désormais recommandée chez les jeunes filles entre 11 et 14 ans.
Chez l’adulte
. Les rappels contre la diphtérie à dose réduite en anatoxine, le tétanos et la poliomyélite (dTP) se font désormais à âge fixe à 25, 45 et 65 ans, puis, compte tenu de l’immunosénescence au-delà de 65 ans, un intervalle de 10 ans est recommandé entre chaque rappel, soit à 75, 85 ans, etc.
. Un rappel contre la coqueluche à dose réduite en antigènes coquelucheux, en complément de la stratégie de cocooning, est recommandé à l’âge de 25 ans (dTcaP).
Autres recommandations.
Les autres les recommandations introduites dans le calendrier 2013 concernent notamment les vaccinations contre la grippe saisonnière, les infections à papillomavirus humains (HPV) et la vaccination contre la rage.
. Les patients atteints de maladie hépatique chronique avec ou sans cirrhose sont ajoutés à la liste des personnes éligibles à la vaccination.
. L’âge de début de la vaccination contre le papillomavirus (HPV) chez les jeunes filles est avancé à 11 ans (entre 11 et 14 ans), pour une meilleure réponse immunitaire. « Recommander l’initiation de la vaccination entre 11 et 14 ans plutôt qu’à 14 ans introduit plus de souplesse et permet au médecin et à la famille, en fonction de leurs perceptions, de proposer la vaccination soit à un âge où il n’est pas indispensable d’aborder la question de la sexualité, soit plus tard dans le cadre d’une information sur la sexualité et les maladies sexuellement transmissibles », explique L’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES).
L’âge du rattrapage passe à 15-19 ans, et non plus 15-23 ans pour diminuer le risque de vacciner des femmes déjà infectées.
. Pour la rage, en pré-exposition, après le schéma J0, J7 et J21 ou 28, les rappels à un an puis tous les cinq ans ne sont plus recommandés systématiquement. Pour les professionnels exposés (vétérinaires, personnels de laboratoire manipulant du matériel contaminé…), les rappels seront fonction du niveau de risque d’exposition et des contrôles sérologiques. Pour les chiroptérologues, le rappel à un an reste systématique, les suivants seront fonction des sérologies annuelles.
Transition entre ancien et nouveau calendrier.
Le ministère de la Santé demande aux professionnels de santé de se recaler le plus rapidement sur le nouveau calendrier. Un tableau précisant les conditions de la poursuite de la vaccination pour toute personne ayant reçu des vaccins avant la mise en place du nouveau calendrier est ajouté au nouveau calendrier vaccinal. L’INPES met à disposition des professionnels une série de documents comme le disque calendrier vaccinal 2013, des Questions-réponses sur le calendrier ou des « repères pour votre pratique » sur la prévention du cancer du col de l’utérus et sur la vaccination contre la tuberculose. Des documents à remettre aux patients ou à apposer dans les cabinets ou les lieux de soins sont également disponibles sur www.inpes.sante.fr.
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