Paris (75)
Dr Philippe Rodet
Dans plusieurs pays et notamment en Europe, les effets de la crise sur l’état moral se font sentir de manière dramatique, les suicides sont de plus en plus nombreux.
On craignait une telle situation depuis l’automne 2008, sachant que les crises mettent généralement trois ans pour avoir un impact négatif sur le suicide. Margaret Chan, la directrice générale de l’OMS, dès octobre 2008 alertait sur ce danger : « Nous ne devrions pas sous-estimer les turbulences et les conséquences probables de la crise financière. Il ne faudra pas être surpris de voir plus de personnes stressées, plus de suicides et plus de désordres mentaux. »
Actuellement, alors que plusieurs pays sont confrontés à ces drames, osons nous inspirer de ce qui s’est avéré efficace. Au Québec, les résultats obtenus dans ce domaine sont très intéressants : le taux de suicide est passé de 30 décès par suicide pour 100 000 personnes à la fin des années 2000 à 13,5 pour 100 000 en 2009.
Tout d’abord, il est indispensable de faire en sorte que la souffrance morale ne soit plus perçue comme une faiblesse. Au Québec, dans les secteurs où cette perception a évolué, le taux de suicide a baissé alors que ce n’est pas le cas dans les milieux où ces tabous persistent. Quand une souffrance est considérée comme un phénomène passager susceptible de toucher tout un chacun, on ose davantage demander de l’aide. Et on a ainsi plus de chance de s’en sortir !
Ensuite, il semble nécessaire d’associer à cette prise de conscience, des actions inspirées des travaux du Pr Jean-Jacques Breton, professeur de psychiatrie canadien. Selon lui, tout comme il existe des facteurs de risque, il existe des facteurs de protection : « On a beaucoup parlé des facteurs de risque dans la problématique du suicide. Mais ce qu’on a découvert, c’est qu’il y a aussi des facteurs de protection. S’il y a des facteurs de protection, le risque d’avoir des idées suicidaires diminue. Ce n’est pas magique, bien sûr, mais si on favorise ces facteurs de protection, les gens peuvent améliorer leur capacité à faire face aux événements stressants. On peut les outiller. »
Parmi ces facteurs de protection, ceux auxquels on pourrait recourir concernent les liens sociaux, le sens, les objectifs, les valeurs… Autant de leviers souvent altérés dans les périodes d’incertitude.
- Les liens sociaux :
À l’échelle de la société, il s’agit de retrouver la voie de la fraternité. Un monde où chacun pense à l’autre est un monde où tout le monde gagne, celui qui aide et celui qui reçoit de l’aide, c’est « l’altruisme égoïste » cher à Hans Selye. Osons développer ce qui marche si bien au Canada : les sentinelles. Il s’agit de faire émerger une véritable vigilance partagée en formant des citoyens à savoir tendre la main à leurs semblables lorsque ceux-ci traversent des périodes difficiles.
Au niveau de l’entreprise, encourageons tout ce qui peut inciter les uns et les autres à mieux se connaître, à mieux se comprendre, aidons à la diffusion du respect et à la culture du sentiment de justice, favorisons le partage de passions…
- Le sens :
Le sens est puissamment protecteur en termes de santé, de nombreuses études le montrent.
Dans nos grands états modernes, il faut que chaque citoyen se sente véritablement acteur, si ce n’est de l’avenir de son pays, d’une cause d’intérêt général.
Au sein des entreprises, cultivons le sens en aidant tout un chacun à bien voir à quel point il est un maillon indispensable de la stratégie globale.
- Les objectifs :
« Le but fournit de l’énergie pour la vie », explique Mihály Csíkszentmihályi, le célèbre psychologue de renommée internationale. Avoir une ambition réaliste avec des objectifs intermédiaires est la garantie d’une véritable qualité de vie et d’un certain succès.
Dans les entreprises, une véritable gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences doit permettre à chacun de se réaliser au mieux et parfois, même, de se dépasser.
- Les valeurs :
Les valeurs humanistes, valeurs fondatrices de notre civilisation, doivent se retrouver dans les projets politiques.
On s’est aperçu que les collaborateurs d’une entreprise vont d’autant mieux que le mode de management est adapté à la culture du pays. Dans un pays comme la France, un management qui prend appui sur les valeurs humaines sera autant protecteur que source de réussite.
C’est maintenant que, chacun de nous, doit s’engager à tout faire pour cultiver l’envie de vivre !
C’est maintenant que chacun de nous doit devenir l’acteur d’une nouvelle forme de contagion : la contagion de la bienveillance.
Retraites : contre les idées reçues
Hazebrouck (59)
Dr Christian Delattre
Certains propos sur la retraite des médecins libéraux sont alarmants : cotisations élevées pour les actifs, pensions de misère pour les futurs retraités.
La récente réforme n’a fait qu’accroître ce pessimisme, augmentant les premières, diminuant les secondes.
Pour mesurer notre effort de retraite par répartition, il convient de comparer notre système à celui d’autres professions.
Cotisations basses pour les moyens et hauts revenus : défiance envers la répartition ?
Contrairement aux idées reçues, les cotisations, en pourcentage des revenus, sont faibles par rapport à celles des salariés, si l’on cumule pour ces derniers les parts patronales et salariales : 18 % versus 24 %.
Cette contribution modérée des revenus libéraux est un choix politique de la CARMF pour les régimes qu’elle gère (base et complémentaire). Il peut être interprété paradoxalement comme un manque de confiance en elle-même, en tout cas au principe même de retraite par répartition.
Bien évidemment, le niveau faible du montant moyen de la retraite des médecins libéraux, de l’ordre de 2 600 euros par mois en 2011, en est la conséquence directe.
Si ce choix pouvait se comprendre en un temps révolu où le médecin disposait de revenus suffisants pour se constituer à côté du régime de retraite obligatoire un patrimoine confortable, n’est-il pas temps aujourd’hui de réviser cette politique ?
D’autant que bien des médecins libéraux n’ont plus la chance désormais de bénéficier de la vente de leur présentation à patientèle lors de leur départ en retraite.
Un effort proportionnel aux revenus
La CARMF doit continuer à réduire les cotisations trop élevées pour les bas revenus (elles peuvent en atteindre plus de 25 % pour un revenu jusqu’à 30 000 euros), qui excluent de fait l’exercice à temps partiel de la médecine libérale.
Pour augmenter les retraites avec équité, il faudrait déplafonner l’assiette des cotisations dans les régimes base et complémentaire, réduire le taux de cotisation de 8,6 % pour la tranche 1 en régime de base et en augmenter le plafond, et agir sur la répartition des points pour faire en sorte qu’à travail égal, retraite égale.
Les dessous de l’asv
La proposition de la CARMF de fermer l’ASV s’est heurtée à l’absence de garantie de paiement des droits acquis, dont le montant cumulé jusqu’en 2035 s’élève à 16 milliards d’euros.
Chacun sait que c’est l’État qui était responsable de la cessation de paiement annoncée pour l’ASV en 2014, en l’absence de réforme. Loin des voix alarmistes qui annonçaient une baisse des droits de 50 %, la réforme de 2011, pour difficile qu’elle soit pour les actifs comme pour les retraités, augmentera progressivement jusqu’en 2017 les cotisations au maximum de 100 euros par mois en secteur I, 300 euros en secteur II, et diminuera de 16,4 % la valeur du point à partir de juillet 2012. On peut s’interroger sur le bien fondé du refus actuel de la CARMF de compenser cette baisse des droits ASV par une augmentation de ceux du régime complémentaire, que justifierait la modicité du montant actuel de la retraite des médecins libéraux.
Perspectives démographiques
La courbe démographique de la CARMF donne une prévision de baisse des effectifs des actifs de 24 % entre 2006 et 2025, avant une remontée progressive jusqu’au niveau actuel vers 2040. Ses conséquences sur le régime complémentaire, seul géré complètement par la CARMF, prévoient des réserves minimales en 2040 pour ensuite remonter.
Un rendement productif
En 2012, les rendements instantanés des trois régimes s’élèvent à 5,89 % en moyenne pour celui de base, 6,89 % pour le complémentaire, 26 % pour l’ASV en secteur I (8,68 % en secteur II).
Ces chiffres donnent des arguments aux partisans du maintien de l’ASV, qui présente de loin le meilleur rendement.
Des rachats payants
Pour améliorer le montant de la retraite, la CARMF accorde 10 % de bonus au médecin qui a élevé au moins 3 enfants.
Elle propose des rachats de trimestres en régime complémentaire au rendement intéressant, notamment pour les périodes de service national ou de coopération, pour les médecins femmes (3 trimestres par enfant né pendant l’exercice libéral), et pour un enfant handicapé.
Justification de la répartition
Les crises financières récentes ont prouvé le caractère aléatoire des placements en assurance-vie. Par ailleurs, qui peut affirmer que les délocalisations de pans entiers de notre industrie ne risquent pas d’obérer à terme les rendements de la capitalisation ? Il apparaît donc sage de conforter la CARMF pour lui permettre d’offrir par répartition une retraite décente à l’ensemble des médecins libéraux.
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