« Pas besoin d’avoir la Covid pour se sentir mal. En parler, c’est déjà se soigner » : tel est le message que les radios diffuseront à partir de ce 6 avril et jusqu’au 20 avril pour sensibiliser le grand public à la santé mentale. La campagne, organisée par Santé publique France (SPF) en lien avec le Psycom et le Fil santé jeunes, sera aussi déclinée sur les supports digitaux jusqu’au 11 mai, puis à la télévision et sur les plateformes de vidéos en ligne. Certains spots s’adresseront en particulier aux jeunes de 18-24, aux actifs et aux seniors.
« Près d’un tiers de la population française souffre d’un état anxieux ou dépressif, c’est une épidémie dans l’épidémie qui nécessite des réponses adaptées, fortes et durables pour détecter la souffrance psychique et mettre en place des dispositifs pour prévenir les symptômes et leur chronicisation », a expliqué la directrice de SPF Geneviève Chêne.
Santé mentale dégradée et dispositifs d’aide méconnus
Cette campagne, très attendue depuis l’annonce d’Emmanuel Macron à l’automne dernier et les déclarations d’Olivier Véran lors du Congrès de l’Encéphale en janvier, se fonde en partie sur les données de l’enquête CoviPrev, lancée dès la première semaine du confinement du printemps 2020.
Celle-ci a mis en lumière l’augmentation importante des symptomatologies dépressives et anxieuses, notamment depuis le deuxième confinement, avec une prévalence de 31 % en population générale. Certaines populations sont particulièrement en difficulté : les jeunes, les personnes en situation de précarité (emploi, revenu ou logement), ou celles ayant déjà eu des antécédents de troubles psychiatriques. Par ailleurs, plus de 65 % des Français souffrent de problèmes de sommeil (contre 49 % d’ordinaire) et 9 % ont des idées suicidaires (contre 5 %), selon les résultats de la vague 22 (du 15 au 17 mars).
CoviPrev montre que 43 % des personnes interrogées (un échantillon de 2000 Français représentatifs de la population), s’estiment mal informées sur les symptômes des troubles anxio-dépressifs, que 44 % seraient intéressées par un site internet d’information et 37 % par une ligne téléphonique d’écoute. Ces dispositifs existent, mais seulement 7 % ont entendu parler de Psycom, organisme public national d’information et de lutte contre la stigmatisation, financé sur les fonds du ministère de la santé, SPF, et les Agences régionales de santé. Seuls 17 % identifient le 0 800 130 000 comme le service d’écoute et d’orientation médico-psychologique national.
Une reconnaissance historique de la santé mentale
La campagne nationale se donne donc comme objectif de limiter les impacts négatifs de la crise sur la santé de la population, de favoriser le repérage des principaux symptômes anxieux et dépressifs, d’inciter les personnes à en parler et de favoriser l’accès aux ressources disponibles, notamment le Psycom, le 0 800 130 000 et le Fil santé jeunes (0800 235 236). Ce dernier, créé il y a 26 ans, propose une écoute (grâce à 35 professionnels, de 9 à 22 heures tous les jours) et une orientation vers les lieux proches du domicile du jeune.
Plus profondément, c’est la première campagne de santé publique en France qui parle clairement de la santé mentale − une précédente action de sensibilisation nationale avait eu lieu en 2007, mais ne portait que sur la dépression.
« On vit un moment historique : pour la première fois en France, on parle de santé mentale en tant que telle et l’on prend conscience qu’il n’y a pas de santé, sans santé mentale », s’est réjouie la directrice du Psycom Aude Caria.
L’idée n’est pas de préconiser une orientation systématique vers les professionnels de la santé mentale, mais de promouvoir un continuum, qui passe par les soignants de première ligne, en particulier les généralistes. « Le soin n’est pas seulement médical, il est social, relationnel, éducationnel, etc. En revanche, si les symptômes sont intenses et nous entravent dans nos activités, alors oui, il est nécessaire de voir des spécialistes », conclut Enguerrand du Roscoat, responsable du département Santé mentale de SPF.
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
Dès 60 ans, la perte de l’odorat est associée à une hausse de la mortalité
Troubles du neurodéveloppement : les outils diagnostiques à intégrer en pratique
Santé mentale des jeunes : du mieux pour le repérage mais de nouveaux facteurs de risque