La campagne de vaccination belge, lancée officiellement la dernière semaine de décembre dans trois maisons de repos du pays et massifiée depuis le mardi 5 janvier, essuie déjà les critiques. Au cœur des débats : la stratégie de ciblage des premiers bénéficiaires du vaccin. Pour l'instant, seuls les résidents et le personnel des EHPAD sont concernés. Un choix contesté par les médecins, qui exhortent les autorités à vacciner sans tarder l’ensemble des soignants.
La Belgique avait en effet initialement prévu de vacciner, lors de la première phase, et les résidents des EHPAD et le personnel soignant dans son ensemble. C’était sans compter les retards de livraison des premières doses du vaccin Pfizer/BioNTech : face à la pénurie, les autorités sanitaires ont changé leur fusil d’épaule, laissant sur le bord de la route des soignants décomposés. Durant au moins trois semaines, seuls les résidents et le personnel des EHPAD bénéficieront du vaccin.
Une lettre ouverte au ministre de la Santé
De quoi faire enrager les professionnels, dont certains ont décidé de monter au créneau. Le 5 janvier, un collectif de médecins, soutenu par l’Académie royale de médecine, a adressé au ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke, une lettre ouverte exprimant colère et incompréhension. Le texte, signé par d’éminents infectiologues, épidémiologistes et professeurs en maladies infectieuses des principales universités de médecine du plat pays, rappelle le lourd tribut payé par les « médecins, infirmières, kinésithérapeutes, brancardiers et travailleurs sociaux » depuis de longs mois.
Surtout, s’alarment les signataires, « la pénurie de soignants se fait ressentir comme jamais dans les institutions de soins ». L’urgence est donc de protéger les « combattants de première ligne » encore sur le pont, en leur donnant accès au vaccin dès maintenant. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) elle-même, soulignent-ils, « recommande de donner la priorité de vaccination aux soignants à moyen et haut risque de contracter le Covid. »
L'essentiel de la production en Belgique
« Je pense que les autorités font en effet une grosse erreur », témoigne le Dr Philippe Devos, chef des soins intensifs au CHC de Liège et président du syndicat belge des médecins (Absym). « Les soignants sont surexposés au virus et méritent d’être protégés, souligne-t-il. D’autant que se profile déjà la troisième vague et que nous aurons besoin d’eux ! »
La frustration du personnel soignant est attisée par une cruelle ironie, qui veut que la Belgique, aujourd’hui sevrée de vaccins, en est pourtant l’une des premières productrices mondiales… « C’est un comble, rumine ainsi le Dr Devos. Pfizer produit sur notre territoire des millions de doses, mais ne nous en fournit que 40 000 malheureuses unités par semaine. C’est peu, pour 11 millions d’habitants ! » C’est en effet à Puurs, en Belgique flamande, que sera produit l’essentiel des 300 millions de doses de Pfizer/BioNTech commandées par l’Union européenne.
Sous la pression des médecins, la task force gouvernementale pour la vaccination a tenté d’éteindre l’incendie, en proposant le jour même aux soignants un accès anticipé au vaccin : en février au lieu de mars… Pour les « combattants du Covid » belges, l’heure du répit n’a pas encore sonné.
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