EN DEHORS de la certitude inébranlable qu’il a de son destin, qui peut agacer, mais sans laquelle il n’existe pas de sérieuse candidature à la présidence de la République, François Bayrou n’a pas de défaut. C’est-à-dire qu’il n’a aucun des défauts de Nicolas Sarkozy. Il n’entretient pas des relations privilégiées avec de puissants hommes d’affaires, il dénonce le règne de l’argent (que M. Sarkozy considère comme un élément positif du progrès), il a un respect immense pour la démocratie (il reproche au chef de l’État de ne lui accorder qu’une soumission de façade) et il parle ou écrit avec le langage châtié du normalien. M. Sarkozy, qui aime le tutoiement par-dessus tout et le langage populaire, ne lui arrive pas, de ce point de vue-là, à la cheville.
Catch contre caresses.
La question donc se pose de savoir si, en 2007, les Français n’auraient pas mieux fait d’élire M. Bayrou, qui répète à l’envi qu’il n’a de cesse de protéger une société française dont il exalte les spécifités sans se demander, apparemment, si elles ne correspondent pas souvent à des scléroses, celles-là même que le président actuel, avec sa furia bien connue, tente de combattre sans relâche. C’est clair : M. Bayrou n’entend pas bousculer les Français, alors que M. Sarkozy n’arrête pas de les secouer, de les heurter, de les juger. Si la méthode du président relève du catch, celle, toute en caresses, de son opposant, risque donc ne de ne pas être efficace. L’idéal serait que la réforme se poursuive discrètement et sans broyer les curs, mais l’idéal n’est pas de ce monde.
La personnalité de M. Bayrou, son parcours, son discours de plus en plus strident montrent que, aujourd’hui, il n’est plus du tout le démocrate-chrétien qu’il fut. Dans la virulence de ses critiques, on retrouve des accents besancenotiens. Dans le procès permanent des actions gouvernementales, il partage la virulence de la gauche e tde l’extrême-gauche. Il a, par exemple, contesté vivement le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN, alors que c’est un désir que les centristes français nourrissent depuis 40 ans. Bien entendu, tout le monde a le droit de changer d’avis. M. Bayrou, si ça lui chante, peut ravir au NPA son fonds de commerce. Mais dans ce cas, il se situe non plus entre la droite et la gauche mais entre la gauche et l’extrême gauche, lesquelles, cependant, ne lui reconnaissent guère cette qualité, même si elles s’en inquiètent. Et, toujours dans ce cas, M. Bayrou ne doit pas s’étonner de perdre tous les jours des amis. Il est populaire, certes, mais beaucoup de gens du MoDem ont rejoint le Nouveau Centre. Les sondages n’accordent qu’environ 9 % des voix au MoDem lors des élections européennes du mois prochain. Il ne faut pas tirer de plan sur la comète, mais enfin cela semble signifier que, s’il fait 20 % au premier tour de la présidentielle de 2012, il n’entraînerait, s’il était élu président de la République, que la moitié de ce pourcentage aux législatives. M. Bayrou est une force politique individuelle, il n’est pas, pour le moment, en position de rassembler une majorité. Il est seul.
De plus, si M. Bayrou excelle dans le massacre de Sarkozy, il ne nous dit pas, sauf en queques pages rapides, ce qu’il ferait de mieux, sinon qu’il vénèrerait la démocratie avec une dévotion extrême, qui, dans un contexte social agité, peut conduire à un recul permanent du pouvoir. On éprouve énormément de compassion pour les victimes des licenciements massifs, mais on maintiendrait leurs usines ouvertes qu’on ne saurait pas comment les payer.
Ce qui nous amène à poser une autre question : si M. Bayrou avait été élu président, qu’est-ce qu’il aurait fait mieux que Sarkozy face à la crise mondiale ? Il est assez intelligent pour reconnaître qu’aucun gouvernement, et donc pas celui de la France, ne pouvait faire autrement que de renflouer les banques en premier lieu. M. Bayrou est un élu, il a été ministre, il connaît l’exercice du pouvoir, mais il nous semble que le vulgaire et dominateur Sarkozy a tout de même sauvé votre compte en banque et le mien. Et que toute autre approche que celle du président eût été suicidaire.
Cela dit, la majorité actuelle ne peut pas négliger l’apparente ascension de M. Bayrou. On connaît le schéma en vertu duquel il parviendrait, en 2012, à arracher la deuxième place au premier tour, comme Jean-Marie Le Pen en 2002, et alors les Français se diraient que le chef du MoDem est infiniment plus élégant et décent que M. Sarkozy, et donc qu’il faut voter pour lui. On entend dire que l’Élysée a fait de M. Bayrou son ennemi numéro un, avant le candidat ou la candidate de la gauche. Laquelle peut craindre, effectivement, de n’avoir plus le choix, au second tour, que de donner ses suffrages au candidat dit centriste. Car, bien entendu, M. Bayrou n’est pas M. Le Pen, lequel, en triomphant en 2002, avait tout simplement offert une voie royale à Jacques Chirac.
Enfin, qu’on nous permette de situer à sa vraie place la critique qui fait de M. Sarkozy un potentat de république bananière. Si vous vous sentez libre de vos mots et de vos actes, si vous pensez que la presse, loin d’être muselée, bombarde le président à boulets rouges, si vous avez le sentiment que la scène médiatique n’a de vocation que dans la ridiculisation du pouvoir, vous repousserez ces fredaines qui nous chantent la fin de nos libertés. La seule question qui vaille, c’est la réforme. M. Sarkozy a peut-être des défauts mais nul ne peut nier qu’il l’a engagée, qu’elle est indispensable et qu’elle représente même l’espoir unique de maintenir la France au rang qu’elle mérite.
On a dit que M. Bayrou s’est inspiré, pour son livre du « Coup d’État permanent » publié par François Mitterrand en 1964 et dans lequel le futur président au double décennat dénonçait De Gaulle et les institutions de la Vè République. M. Bayrou prétend qu’il n’a pas fait de cet ouvrage le modèle d’« Abus de pouvoir ». On n’est pas obligé de le croire. On peut même lui rappeler que M. Mitterrand a attendu ensuite 17 ans pour être élu et qu’une fois devenu président de la Rémublique, il s’est coulé avec une volupté fort peu réformatrice dans les institutions d’une République qu’il ne s’est guère soucié, pendant 14 ans, de réformer.
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