Les médecins turcs paient le prix des soins qu’ils ont prodigués depuis vingt jours à ceux qu’ils appellent « les citoyens du mouvement de Taksim ». Première alerte la semaine dernière : le gouvernement Erdogan demande le 13 juin à la Chambre des médecins d’Istanbul de lui communiquer la liste des praticiens officiant dans les centres médicaux d’urgence installés depuis le début des manifestations – ainsi que l’identité des patients traités dans ces structures.
Izzet Tasçi, ministre de la Santé, essuie un refus net et sans appel. « We shall not report one single patient’s or colleague’s name to the ministry of Health » (« Nous ne communiquerons aucun nom de patient ou de confrère au ministère de la Santé »), riposte par écrit la branche stambouliote du Conseil national de l’Association des médecins turcs.
Deuxième alerte : dimanche dernier, un groupe mobile de soignants a été arrêté par la police. Parmi eux, 3 médecins, qui sont restés 48 heures au poste, sans explication, avant d’être finalement relâchés.
Pression et contre-pression
La pression exercée par le pouvoir sur les médecins du pays semble se réduire ces derniers jours.
Il faut dire que la communauté médicale internationale ne s’est pas privée de faire savoir au gouvernement Erdogan ce qu’elle pensait de son initiative. Le bouclier « Hippocrate » a été largement déployé.
Lundi, la Fédération européenne des médecins salariés a publié un communiqué de protestation. Les médecins allemands et l’Association médicale mondiale sont également montés au créneau.
Une cible irritante
Si les médecins turcs irritent tant le pouvoir en place, c’est parce qu’ils apparaissent comme un grand groupe d’opposition, structuré et soudé (parmi les réponses à apporter officiellement à la demande du ministère de la Santé, a d’ailleurs été étudiée la communication... de la liste exhaustive des médecins exerçant à Istanbul).
Dès le début du « mouvement de Taksim », la chambre des médecins turcs a résolu à l’unanimité qu’elle serait « aux côtés de tous les citoyens qui auraient besoin d’une aide médicale ».
« Sans parler de "soutien", les choses se sont faites naturellement », explique le Dr Arda Saygili, pédiatre cardiologue à Istanbul, et délégué de la Chambre des médecins de la ville. « Sachant que s’ils étaient orientés vers les hôpitaux publics, les manifestants blessés seraient automatiquement fichés par la police (voire arrêtés), nous avons ouvert des petites salles d’urgence destinées aux victimes de violences policières. Des médecins, des étudiants en médecine bénévoles y ont pris en charge un total 4 000 personnes », précise le Dr Saygili.
Une infirmerie improvisée à Istanbul.
La Chambre des médecins a tenu un registre précis des blessures prises en charge : ses tables témoignent directement des violences policières commises en Turquie depuis bientôt trois semaines : 4 345 personnes ont été soignées à Istanbul (dans les hôpitaux publics, les cliniques et les salles d’urgence), il y a eu 1 mort et 3 personnes sont encore dans un état critique ; à Ankara, 1328 personnes ont été prises en charge (on compte 1 mort) ; à Izmir, 800 blessés soignés ; à Antakya, 161 (1 mort), à Adana, 152 (1 mort)...
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