« À l’inverse de ce qui était attendu, explique pour « le Quotidien » le Dr David Sassoon, directeur de recherche Inserm et coordonnateur d’un vaste projet de recherche européen sur les pathologies musculaires, voilà comment nous avons construit EndoStem. À la question du plus gros point faible en recherche actuellement, la réponse est en effet unanime parmi les chercheurs. Entre l’hypothèse initiale et les premiers essais cliniques, il faut compter plusieurs années. Pourquoi devoir attendre au minimum 5 ans avant d’espérer passer aux essais cliniques ? Pour ce vaste projet de recherche sur les pathologies musculaires, nous avons fait le pari de commencer tout de suite par des essais cliniques afin de gagner du temps. La recherche fondamentale viendra derrière pour comprendre ce qui a marché, ce qui n’a pas marché ou encore ce qui a marché mieux que prévu ».
Allers et retours avec la recherche fondamentale.
Et si le pari est osé, il a sacrément séduit. Des équipes de recherche de toute l’Europe ont répondu à l’appel et se sont associées à des partenaires industriels. En tout, pas moins de quatorze membres, qui ont défendu le projet auprès de la Commission Européenne, à Bruxelles, pendant un an avant son lancement officiel début janvier 2010. « Deux nouveaux essais cliniques vont être lancés d’ici 18 mois, précise David Sassoon. Les équipes poursuivent bien entendu leurs travaux de recherche déjà en cours. C’est un gros atout que de commencer par les essais cliniques. Le retour à la recherche fondamentale nous permettra de lancer par la suite des essais cliniques modifiés et d’améliorer d’autant les résultats escomptés ». La plupart des molécules testées sont déjà utilisées en clinique, mais pas dans ces maladies, ni à ces dosages. Ainsi le monoxyde d’azote (NO), les antioxydants et la myostatine vont faire l’objet d’essais de phase II et I/II. Le projet EndoStem s’attache ainsi à développer des stratégies visant à réparer directement les tissus musculaires endommagés, que ce soit au niveau du muscle squelettique, des vaisseaux, du système immunitaire ou des cellules souches.
Facteurs de croissance.
« Plutôt que passer par la quantité de cellules souches, qui n’est pas sans soulever de nombreuses questions, il semble que s’intéresser au milieu environnant et en particulier aux facteurs de croissance soit plus rentable. Le moyen serait astucieux pour contourner ces difficultés », souligne le coordinateur d’EndoStem. Les cellules souches posent en effet des problèmes logistiques et éthiques. Tout d’abord, l’utilisation des cellules souches d’origine embryonnaire reste très partagée. Sans compter qu’il s’agit d’une technologie très chère. Le système public a-t-il les moyens de les subventionner ? De plus, le risque de survenue de cancers n’est pas totalement maîtrisé et l’utilisation de virus pour le transfert de gènes pose le problème d’arrêter l’expression du gène ectopique, si les effets ne sont pas aussi positifs que prévus.
« Alors que le nombre de cellules souches reste inchangé au cours de la vie, explique le Dr Sassoon, les facteurs de croissance présents dans le milieu environnant se modifient avec l’âge. Ce phénomène expliquerait pourquoi les enfants cicatrisent très vite par rapport aux adultes. Il suffirait ainsi d’identifier ces facteurs de croissance et de les développer ensuite en pharmacologie. A priori cette approche permettrait de s’affranchir du risque de cancer et de mieux maîtriser le traitement. Si les effets ne sont pas bons, il suffit d’arrêter les médicaments».
Curieusement, alors qu’EndoStem lui-même est le fruit d’une collaboration entre public et privé, David Sassoon souligne néanmoins la nécessité de valoriser la recherche fondamentale. « Il existe en Europe une tendance de plus en plus marquée à encourager les partenariats avec le privé, explique le chercheur d’origine américaine. Pour notre projet, c’était le bon moment pour s’allier avec les industriels. Mais d’une manière générale, se limiter à des projets de court terme, c’est se priver de chances pour le futur. Il faut au contraire repérer les talents d’aujourd’hui et les soutenir. De la recherche fondamentale pure dépendent les applications de demain ».
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