Amylose héréditaire à transthyrétine

Le patisiran, premier agent thérapeutique capable de reverser la maladie

Par
Publié le 11/01/2018
Article réservé aux abonnés

Maladie autosomique dominante provoquée par une mutation du gène de la transthyrétine (TTR), l'amylose héréditaire à transthyrétine (hATTR) est une pathologie multisystémique, évolutive et débilitante pouvant engager le pronostic vital dans un délai de 2 à 15 ans. Elle touche environ 50 000 personnes à travers le monde.

La prise en charge actuelle de l'hATTR repose sur le traitement des symptômes et les thérapies ciblées : transplantation hépatique sous certaines conditions et stabilisateurs cinétiques de la TTR. « Des traitements qui permettent de réduire la progression de la maladie mais pas de l'arrêter », souligne le Pr David Adams, neurologue à l'hôpital Bicêtre de l'AP-HP.

L'ARN interférent, nouvel outil thérapeutique

Laboratoire spécialisé dans le développement d'agents thérapeutique à ARN interférent (ARNi), Alnylam Pharmaceuticals s'est associé à Sanofi Genzyme pour évaluer l'efficacité du patisiran, un agent expérimental à base d'ARNi, dans le traitement de l'hATTR avec neuropathie. Les ARNi sont des ARN courts capables d'inactiver un gène en se liant à l'ARNm pour le dégrader, interrompant ainsi la synthèse de la protéine correspondante.

L'étude de phase 3 APOLLO a été menée sur 225 patients issus de 19 pays et présentant une hATTR avec polyneuropathie de stade 1 ou 2. Les malades, randomisés avec un ratio 2:1, ont reçu soit 0,3 mg/kg de patisiran (N = 148) soit le placebo (N = 77) IV toutes les 3 semaines. L'âge moyen des patients était de 61 ans et 38 mutations différentes du gène de la TTR ont été identifiées. Le NIS (neurological impairment score) moyen était de 59,3, 75 % des patients avaient un PND (polyneuropathy disability) > 1 (difficultés à marcher) et 56 % une implication cardiaque.

Des résultats complets positifs

Le patisiran a atteint son critère d'évaluation principal, une variation du score modifié des atteintes neuropathiques (mNIS +7), à 18 mois, avec une différence moyenne de 34,0 points par rapport au placebo (p = 9.26 x 10-24) et une variation moyenne négative de 6,0 points (amélioration) du mNIS +7 par rapport au score de départ.

Il a également atteint tous ses critères d'évaluation secondaires à 18 mois : le score NIS-W (force musculaire) (p = 1,40 x 10-13), le score sur l’échelle R-ODS (Rasch-built Overall Disability Scale) (p = 4,07 x 10-16), le score 10-MWT du test de marche (p = 1,88 x 10-12), l’indice de masse corporelle modifiée (IMCm) (p = 8,83 x 10-11) et le score COMPASS-31 pour l'évaluation des symptômes du système nerveux autonome (p = 0,0008). Une différence moyenne de 21,1 points par rapport au placebo (p = 1,10 x 10-10) et une variation moyenne négative de 6,7 points (amélioration) du score de qualité de vie obtenu au moyen du questionnaire Norflok QOL-DN par rapport au score de départ ont également été observées.

Des effets significatifs ont été obtenus à 18 mois sur certains biomarqueurs cardiaques exploratoires et paramètres échocardiographiques dans une sous-population pré-spécifiée de patients cardiaques, par rapport au placebo.

Enfin, le profil de sécurité et de tolérance est encourageant par rapport au placebo, pour une thérapie sur le long terme : la majorité des effets secondaires sont légers à modérés (œdèmes périphériques, réactions liées à la perfusion) et parmi les 7 décès enregistrés dans le groupe patisiran, aucun n'a été considéré comme lié au médicament.

« C'est la première thérapie capable non seulement d'améliorer la neuropathie mais également de reverser la maladie », fait remarquer le Pr Adams, investigateur principal de l'étude. Et le neurologue de souligner : « les différents effets positifs sont observés quels que soient le génotype de la TTR et l'origine géographique des patients. »

Fort de ces résultats, Alnylam entend déposer une demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans l’Union européenne dans les prochains mois.

Conférence de presse d'Alnylam Pharmaceuticals

Stéphany Mocquery

Source : Le Quotidien du médecin: 9630