« Je vous félicite d’avoir su développer un savoir-faire hospitalier de grande qualité au domicile, avec toute la technicité d'un établissement de santé ». La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a adressé un signal clair au secteur de l'HAD, lors de ses universités d'hiver, à Paris.
Alors que la loi de santé a inscrit l'hôpital dans le virage ambulatoire, la ministre a rappelé la « nécessité » de déployer l'HAD dans un contexte de population vieillissante et d'augmentation des maladies chroniques. « Il convient de développer l'HAD dans les établissements et services médico-sociaux mais aussi de poursuivre la mise en œuvre de dispositifs de sortie précoce de chirurgie », insiste la ministre alors que les résultats de l'hospitalisation à domicile restent en deçà des attentes malgré la dynamique indéniable depuis dix ans (lire encadré).
L'an dernier par exemple, seulement 6 % des journées en HAD ont concerné des patients de ces établissements (sociaux, médico-sociaux avec hébergement et EHPAD) un taux « insuffisant » selon Agnès Buzyn. « Ces résidents très âgés peuvent voir leur état s'aggraver en hospitalisation conventionnelle », estime-t-elle.
Un outil en ligne d'aide à la décision
Des avancées ont été actées ces derniers mois pour mettre de l'huile dans les rouages. Un décret de mai 2017 relatif au fonctionnement des établissements d’HAD permet au médecin coordonnateur d'intervenir en l'absence du médecin traitant.
De son côté, la Haute autorité de santé (HAS) vient de mettre au point le premier outil en ligne (ADOP-HAD) d'aide à la décision d'orientation pour les prescripteurs (libéraux ou hospitaliers), qui permet d'estimer si un patient est éligible ou non. L'outil se présente sous la forme d'un algorithme avec plusieurs critères de sélection à cocher en « maximum 8 clics », promet la HAS, consciente qu'il faut accompagner le changement des mentalités.
Dans un système toujours trop cloisonné, la ministre de la Santé promet aussi un geste pour faciliter la coopération entre acteurs. « Dès la campagne budgétaire 2018, vos établissements seront autorisés à intervenir avec les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), quels que soient les modes de prise en charge pour les patients âgés fragiles et en fin de vie », a assuré Agnès Buzyn. Pour éviter « les ruptures de prise en charge », la ministre affiche également son soutien aux transfusions sanguines à domicile et à la mise en place « du suivi des sorties précoces de chirurgie » par les équipes du secteur MCO (court séjour) et d'HAD.
Coup de collier
Côté financement, Agnès Buzyn estime que la tarification actuelle « ne correspond pas à la réalité des maladies neurodégénératives prises en charge en hospitalisation à domicile ». Le ministère étudie des évolutions « pour tenir compte de la lourdeur de la prise en charge ».
Peu avant l'intervention ministérielle, le Dr Élisabeth Hubert, présidente de la FNEHAD, avait une nouvelle fois réclamé un soutien actif alors que les objectifs de déploiement de l'HAD (1,2 % des séjours hospitaliers totaux) ne sont pas atteints. « Les chiffres 2017 indiquent moins de 1 % des séjours hospitaliers et une progression annuelle de notre activité inférieure 5 % , il va falloir donner un sérieux coup de collier », insiste le Dr Hubert.
Vents porteurs
Dans les esprits, l'HAD marque des points mais sans transformer l'essai. Le Dr Olivier Véran, député LREM de l'Isère, chargé du budget de la Sécu, croit « très fort » dans l'hospitalisation à domicile. « On sent qu'il y a une appétence, y compris chez les médecins, mais il faudrait plus de formation, notamment lors des études médicales », estime le neurologue hospitalier. Nicolas Revel, directeur général de l'assurance-maladie, constate que l'HAD peine à décoller malgré un « écosystème favorable ». « L'HAD n'est pas encore assez connue, l'hôpital ne joue peut-être pas assez son rôle de promotion », observe le patron de la CNAM.
De fait, selon une enquête ViaVoice pour la FNEHAD, un généraliste sur deux souligne ne jamais avoir reçu d'informations sur l’HAD ; pourtant 60 % d'entre eux aimeraient avoir des précisions sur la prise en charge et sur les indications pour prescrire plus souvent de l'HAD. Le Dr Philippe Boutin, président de la conférence nationale des URPS médecins libéraux, assure que les attentes des patients comme des médecins sont « maximales ». Un présage favorable ?
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