Sarkozy : faire fructifier son bilan et attaquer son adversaire

Publié le 24/04/2012
Article réservé aux abonnés

EN 2007, Nicolas Sarkozy disait de son programme santé et de celui de Ségolène Royal, que c’était « le jour et la nuit ». Il est vrai que le candidat UMP avait pris le contre-pied de sa rivale socialiste sur plusieurs fronts. C’est un tout autre scénario qui s’est déroulé ces derniers mois : Nicolas Sarkozy a tardé à entrer en campagne. « Le président va chercher à cliver, il se positionnera sur des valeurs mais ne fera pas de programme en tant que tel », confiait l’un de ses proches courant mars.

C’est à présent un Nicolas Sarkozy affaibli qui se trouve en lice pour le second tour. Le premier président sortant à ne pas être arrivé en tête du premier tour sous la Ve République va devoir (re)monter au front. Sur tous les dossiers, santé y compris. Dans l’entretien qu’il a accordé au « Quotidien » le 12 avril, Nicolas Sarkozy a déclaré qu’il n’y aurait pas de loi HPST (Hôpital, patients, santé, territoires) bis s’il est réélu. L’essentiel est en place pour permettre au système de santé français de conserver son premier rang mondial, estime-t-il. Le président entend capitaliser sur ses actions passées, réforme HPST en tête. « Je pense qu’il faut désormais laisser le temps aux acteurs de s’approprier ces réformes », dit-il.

Certaines promesses non tenues remises au goût du jour.

À François Hollande, il reproche d’être flou : « Quelles sont les propositions du parti socialiste ? Encadrer strictement [les dépassements d’honoraires, NDLR], ça veut dire quoi ? Comment souhaite-il s’y prendre ? Souhaite-il revenir entièrement sur le secteur 2 ? Une campagne, c’est fait pour être précis, pas pour entretenir le flou ». Mais pour rétablir l’égalité dans l’accès aux soins - une préoccupation majeure des Français -, Nicolas Sarkozy ne promet pas de mesure radicale. Lui qui se montrait plus offensif en 2007 a désormais banni le mot coercition de son vocabulaire. « Je crois en l’incitation », répète le chef de l’État à l’envi.

Dans le détail, Nicolas Sarkozy promet de développer les forfaits, relever à nouveau le numerus clausus, créer des maisons médicales de garde aux abords des hôpitaux afin de soulager les urgences, développer la chirurgie ambulatoire tout en diminuant le nombre de lits hospitaliers, créer des passerelles entre les différentes professions de santé, ou encore la fameuse TVA sociale. Il ne reviendra ni sur la tarification à l’activité, ni sur la liberté d’installation, pas plus que sur le paiement à l’acte. Et il remet au goût du jour certaines de ses promesses non tenues : réforme de la dépendance, mise en place d’un vrai secteur optionnel, développement de l’intéressement à l’hôpital, financement des établissements de santé sur la base de critères qualitatifs, et non plus seulement quantitatifs. Le tout en maintenant un ONDAM (Objectif national des dépenses d’assurance-maladie) à 2,5 %, mais sans slogan aussi définitif que son « zéro déficit à l’hôpital en 2012 », autre promesse non tenue.

Dans l’entourage du président de la République, on s’accorde à penser qu’il faut aller plus loin en matière de réformes. Mais les avis divergent sur la méthode à employer. Certains conseillers prônent la poursuite du dialogue avec les professionnels de santé pour améliorer le décloisonnement de la ville et de l’hôpital. D’autres rêvent d’une réforme éclair, dès cet été, afin de ne pas reproduire les erreurs passées. « Il y a eu de grosses avancées au cours de ce quinquennat - la loi HPST, les Agences régionales de santé -, mais il y a eu des reculs car les lobbies ont joué leur rôle et tenté de désosser le projet, estime cet observateur proche de l’UMP. On n’est pas allé assez loin dans la contrainte à l’installation. Les infirmiers et les pharmaciens sont déjà contraints, pourquoi pas les médecins ? Cela se fera, c’est la prochaine étape. On a trop flatté le corps médical. Il faut aller plus loin dès le lendemain des élections. Il faut que Nicolas Sarkozy prenne le dossier de la rémunération et de l’installation des médecins libéraux à bras-le-corps. Tout de suite ! La clé, ce sera le passage du financement à l’activité, qui a été un moteur, au forfait tenant compte de la qualité ».

DELPHINE CHARDON

Source : Le Quotidien du Médecin: 9118