LE QUOTIDIEN – À quoi va servir le CODEEM et sera-t-il indépendant vis-à-vis du LEEM ?
YVES MEDINA – Les statuts du LEEM prévoient qu’une de ses grandes missions institutionnelles est de veiller au respect des règles éthiques par les industriels, et de favoriser la promotion de ces règles. Et l’idée, c’est de faire du CODEEM l’outil de cette ambition. C’est fondamental, car c’est le signe de la prise en main par l’institution de sa responsabilité déontologique. Notez que sur les 11 membres du CODEEM, 8 ne sont pas issus de la profession. C’est un exemple assez unique d’une organisation représentative qui se dote d’un outil déontologique au sein duquel elle accepte d’être minoritaire. L’indépendance du CODEEM est garantie par le fait que ses membres sont désignés pour une durée de trois ans renouvelable, mais ils ne sont pas révocables. On retrouve un peu l’idée de l’inamovibilité des magistrats. Enfin, pour être membre du Comité, il faut ne pas avoir de conflit d’intérêt avec la profession, et des déclarations d’intérêt sont demandées préalablement à chacun à sa nomination. De plus chaque membre signe une déclaration de confidentialité par laquelle il s’engage à ne pas révéler les débats internes et à être solidaire des positions collégiales que rendra publiquement le CODEEM.
Celui-ci aura par ailleurs une dimension de médiation. Il donnera des conseils aux professionnels qui viendront l’interroger et émettra des avis. Ces avis ne seront pas rendus publics. En revanche ce qui sera rendu public, ce seront les alertes que le Comité émettra lorsqu’il estimera que telle bonne pratique devra être mise en œuvre, que telle autre doit être modifiée, ou qu’il y aura une inquiétude sur telle pratique observée.
Quelle publicité donnerez-vous à vos travaux ?
Le CODEEM publiera un rapport annuel qui relatera l’ensemble des travaux, les évolutions jurisprudentielles qui en auront découlé, et les sanctions éventuelles qu’il aura prononcées. Sa mission principale n’est pas d’être un père fouettard, mais d’être une force de propositions, de veille, de recommandations pour aider la profession à améliorer ses pratiques. Mais des sanctions pourront être décidées, allant de la mise en garde, jusqu’à la proposition faite au conseil d’administration du LEEM de suspendre ou de radier un de ses membres. Elles devront être exceptionnelles et exemplaires.
Quel est votre programme de travail ?
Sous réserve de l’accord de la collégialité du Comité, mon idée est de travailler au recueil des dispositions déontologiques professionnelles (DDP), qui est un peu la bible déontologique du monde des entreprises du médicament. Notre première tâche sera de s’assurer que les industriels se sont bien approprié ce document et mettent en œuvre les principes qu’il contient. Je ne suis pas certain que tous le fassent, je suis même convaincu de l’inverse.
Ensuite, il y a quelques grands sujets à voir. Par exemple, le CODEEM ne peut pas rester silencieux sur la visite médicale. Au moment où le parlement en est saisi, il n’est pas possible que l’instance de déontologie ne donne pas aux uns et aux autres son analyse éthique et déontologique du sujet. N’oublions pas qu’une charte sur la visite médicale a été signée en 2004 avec le CEPS [Comité économique des produits de santé].
Il faudra de plus revoir les dispositions relatives dans le DDP aux relations avec les professions de santé, avec les colloques, les congrès et autres manifestations professionnelles. Peut-être qu’on peut faire mieux. De même, nous nous pencherons sur les relations avec la presse. Ca nous fait déjà l’amorce d’un bon programme de travail.
Si le CODEEM avait été mis en place il y a un an, auriez-vous demandé la suspension de Servier du LEEM ?
Oui, certainement. Les circonstances étaient telles qu’elles conduisaient à suspendre ce laboratoire. La lucidité rétrospective est certes une chose facile, mais je crois que sur le fond du dossier, nous aurions proposé au minimum une suspension.
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