Autorisé en accès précoce en janvier 2022, l’antiviral Paxlovid (nirmatrelvir/ritonavir) a été prescrit au premier semestre (du 4 février au 29 juin) à un peu plus de 10 000 patients (âge moyen de 66 ans, 54 % de femmes) atteints de Covid-19 et à risque d’évolution vers une forme grave. L’étude de pharmacoépidémiologie menée par Epi-Phare (ANSM/Cnam)* sur ces patients permet de dresser un premier bilan de son utilisation, sans pouvoir, par manque de données de suivi, tirer de conclusion sur son efficacité en vie réelle.
Sur la période étudiée, le taux brut global d'utilisation en France est estimé à 18 patients pour 100 000 habitants, avec des taux particulièrement élevés en Martinique (154/100 000), en Guadeloupe (63/100 000), en Côte-d’Or (41/100 000), à Paris (34/100 000) et dans les Pyrénées-Atlantiques (32/100 000).
Un délai médian de deux jours entre les symptômes et la prescription
D'après les données transmises par le laboratoire, les prescriptions de Paxlovid ont été autant le fait des médecins de ville (52,1 %) que des médecins hospitaliers (47,9 %). Pour la majorité des patients (64 %), le médicament a été délivré en pharmacie de ville, ajoute l’ANSM dans un communiqué. Alors que l'utilisation du Paxlovid était principalement prévue en ville, l'Agence estime que le taux de prescription équivalent entre ville et hôpital est en partie lié à « un manque d’information des médecins prescripteurs quant à la disponibilité du Paxlovid, notamment en ville ».
Le délai médian entre le début des symptômes de Covid-19 et le traitement respecte en revanche les recommandations. Il était de 2 jours entre les symptômes et la prescription et de 3 jours entre les premiers signes cliniques et la délivrance en pharmacie (3,2 jours pour les pharmacies de ville et 2,4 jours pour les pharmacies hospitalières, en moyenne).
Manque de données pour une évaluation en vie réelle
Par rapport à la population générale adulte, ces patients étaient plus âgés (66 ans contre 51 ans) et un peu plus favorisés sur le plan socio-économique. Ils étaient également porteurs de plus de comorbidités, comme l’hypertension (53 contre 23 %), le diabète (19 contre 7 %), la dyslipidémie (29 contre 13 %) ou encore des cancers actifs (20 contre 2 %) et des troubles névrotiques et de l’humeur (16 contre 8 %).
Parmi les sujets de l’étude, 80,4 % avaient un statut vaccinal complet au moment de l’inclusion, 6,8 % un statut vaccinal incomplet et 12,8 % n’avaient reçu aucune dose. Seuls 3,9 % des patients avaient reçu un traitement par anticorps monoclonaux à l’inclusion.
L’évaluation de l’efficacité du traitement en vie réelle reste pour l’heure difficile à mener. Les données de suivi à J28 n’ont été recueillies que pour 6 % des patients de l’étude (655/10 520 fiches de suivi attendues). Pour autant, « les données recueillies dans le cadre de cet accès précoce ne sont pas de nature à modifier le rapport bénéfice/risque du Paxlovid dans cette indication », soulignent les auteurs.
Des cas d’élévations de la pression artérielle à surveiller
En termes de pharmacovigilance, les données « confirment le profil de sécurité d'utilisation du Paxlovid », juge l’ANSM. Les dysgueusies et les troubles gastro-intestinaux étaient les effets indésirables les plus fréquemment notés. Des cas d’interactions médicamenteuses ont été rapportés « sans constituer un nouveau signal, ces interactions étant attendues selon le résumé des caractéristiques du produit (RCP) », soulignent les auteurs.
Quelques cas d’élévations de la pression artérielle, « essentiellement non graves et de façon transitoire », ont été rapportés. Également observé lors des essais cliniques, cet effet est « considéré comme un signal potentiel à investiguer », poursuivent-ils. « Les utilisateurs de Paxlovid pourraient avoir un risque d’exposition à la simvastatine (médicament contre-indiqué) de 2 % (…), et un risque d’exposition au bisoprolol (non recommandé) pourrait être de 7 % », est-il précisé.
Enfin, les phénomènes de « réinfection au Covid-19 » ou de « phénomène rebond », observés à l’international et étudiés par le laboratoire, n’ont pas été signalés en France « à la date de clôture de ce rapport », est-il indiqué.
*À partir des données du Système national des données de santé (SNDS).
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation