C’est en 1993 que Didier Tabuteau, alors directeur de cabinet de Bernard Kouchner, ministre de la Santé, met sur pied l’Agence du Médicament, qui deviendra l’AFSSAPS en 1998. Didier Tabuteau sera d’ailleurs le premier directeur général de cette agence de 1993 à 1997. « Très affecté à titre personnel par la faillite de ce système », ce haut fonctionnaire a quelques idées sur les réformes à mener. Selon lui, il est indispensable que, dans le cadre de la réforme que Xavier Bertrand annonce pour cette année, « des associations de patients, des sociologues, et des gens extérieurs au système, puissent participer aux travaux des commissions scientifiques pour poser des questions, mais aussi pour s’assurer que les dossiers sont suivis ». Didier Tabuteau milite aussi pour que les associations de patients aient la capacité d’imposer des auditions publiques au sein des agences sanitaires. Dans le même esprit, la volonté affichée par Xavier Bertrand de financer l’AFSSAPS intégralement par des fonds publics trouve grâce à ses yeux : « L’état doit considérer qu’il s’agit d’une mission de police qui nécessite un financement adapté par l’impôt », précise-t-il au « Quotidien ».
Mais Didier Tabuteau va plus loin. Il estime ainsi qu’il faut mettre en place une structure externe chargée de l’audit déontologique, « en mesure de vérifier, un peu au hasard, ou à partir d’informations qui lui remonteraient, que les procédures concernant telle commission ou tel médicament ont été respectées, et que des experts ayant des conflits d’intérêt n’y ont pas siégé ». Il propose d’ailleurs de confier cette mission au service central de prévention de la corruption (le SCPC, un service à composition interministérielle qui dépend du ministre de la Justice).
Autre proposition, calquée sur la réforme Obama de l’Assurance-maladie, mettre en place un « sunshine act » à la française, qui consiste à dire que tout expert ou tout médecin intervenant dans une commission, est tenu d’indiquer tous les cadeaux, avantages et invitations qu’il a pu recevoir. Didier Tabuteau propose que cette loi s’applique aussi à tous les responsables administratifs, associatifs et politiques en plus des experts et des médecins.
Mais au-delà de ce système d’expertise défaillant, Didier Tabuteau plaide pour faire de la vigilance et de l’épidémiologie « une mission naturelle de tous les professionnels de santé », en les intégrant à la convention médicale, et en les rémunérant en tant que telles. Pour l’ancien patron de l’Agence du Médicament, « il faut que les médecins et les associations de patients disposent d’un mandat de santé publique dans ce domaine. C’est tout le système qui doit être mobilisé et pas seulement les experts ».
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