Pas question d'autoriser largement l'hydroxychloroquine en France contre le Covid-19 : l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament ) a refusé au Pr Didier Raoult une utilisation plus étendue de cette molécule, qui n'a toujours pas fait la preuve de son efficacité.
« Nous ne pouvons pas répondre favorablement à la demande de RTU [recommandation d'utilisation temporaire, NDLR] de l'hydroxychloroquine dans la prise en charge de la maladie Covid-19 », indique l'ANSM dans un point d'information publié ce vendredi 23 octobre.
« À ce jour, les données disponibles, très hétérogènes et inégales, ne permettent pas de présager d'un bénéfice de l'hydroxychloroquine, seule ou en association, pour le traitement ou la prévention de la maladie Covid-19 », tranche-t-elle.
La RTU, qui donne accès au remboursement, vise une prescription hors AMM massive, au-delà de la prescription au cas par cas. D'où la demande l'Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection, dirigé par le Pr Didier Raoult.
Contre-attaque sur Twitter
Un « deux poids deux mesures », a réagi le médecin sur Twitter après ce refus, accusant l'ANSM de favoriser l'antiviral remdesivir, du laboratoire Gilead, au détriment de l'hydroxychloroquine.
Dominique Martin, directeur de l'ANSM, refuse toute RTU pour l'hydroxychloroquine mais autorise l'envoi de mails promotionnels par Gilead pour le remdesivir, et en organise la distribution gratuite. Deux poids deux mesures. pic.twitter.com/GqSl8vmRZg
— Didier Raoult (@raoult_didier) October 23, 2020
Le remdesivir (Veklury, de Gilead), a reçu début juillet une autorisation conditionnelle de mise sur le marché européen pour les formes graves de Covid-19 et il bénéficie en France d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) de cohorte. Les études publiées montrent qu'il pourrait réduire la durée d'hospitalisation des patients, mais qu'il a peu ou pas d'effet sur la mortalité.
Au mois de septembre, la Commission de la transparence de la HAS avait considéré que l'accès au remboursement du Veklury n'était justifié que dans certaines catégories de la population et jugé son service médical rendu faible voire insuffisant.
L'ANSM publie également une lettre de huit pages envoyée au microbiologiste marseillais, en réponse à sa demande de RTU. Elle y retrace l'historique des utilisations et des essais dans le monde de ce médicament que le directeur de l'IHU de Marseille défend bec et ongles pour traiter le Covid-19, soulignant qu'elles n'ont pas démontré son efficacité.
Consensus scientifique
« En conclusion, lorsque l'on fait un point de situation des études publiées (...) depuis le rapport du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) du 23 juillet, il n'est pas identifié de données de nature à remettre en question les conclusions de ce rapport, non en faveur de l'utilisation de l'hydroxychloroquine seule ou en association avec l'azithromycine, en traitement ou en prévention », écrit le gendarme du médicament.
L'ANSM évoque aussi « les recommandations thérapeutiques internationales traduisant un consensus scientifique » allant dans le même sens. Elle relève par ailleurs que dans son courrier de demande d'élaboration d'une RTU, daté du 3 août, le Pr Raoult cite l'hydroxychloroquine « sans préciser les modalités envisagées de son utilisation (en termes de population cible, de schéma d'administration, de potentielle association avec l'azithromycine) » et qu'il a par ailleurs « adressé par mail des publications dont toutes ne sont pas validées par un comité de lecture de revue ».
L'agence sanitaire précise que « cette position pourra être révisée », si on lui apportait de nouvelles études cliniques probantes. Cette décision peut faire l'objet d'un recours en annulation devant le Conseil d'État dans un délai de deux mois à compter de réception.
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