« La dermatite atopique (DA) de l’adulte est une affection méconnue mais fréquente: 3 à 4 % des adultes en seraient atteints en moyenne en Europe. Elle peut prolonger une DA de l’enfance et/ou de l’adolescence ou survenir de novo à l’âge adulte, même après 40 ans », indique la Pr Staumont.
Depuis l’arrivée sur le marché il y a 15 ans du tacrolimus, médicament utile dans les formes légères à modérées de DA mais qui n’a pas révolutionné la prise en charge, il n’y a eu aucune avancée thérapeutique dans la DA.
L’arrivée prochaine des biothérapies change la donne et attire l’attention sur l'impact de la DA. « La DA peut – comme le psoriasis — altérer la qualité de vie de façon considérable, provoquer de l’anxiété, de la dépression, retentir sur la qualité du travail, augmenter l’absentéisme… », explique la Pr Staumont. Les coûts sociaux indirects de la DA, évalués aux États-Unis, sont au moins égaux à ceux du psoriasis : consommation de médicaments, hospitalisations dans les formes très sévères, retentissement sur la productivité, etc.
Si les formes légères à modérées de DA sont le plus souvent contrôlables par des soins locaux (émollients, dermocorticoïdes, tacrolimus topique), la situation est différente dans les formes sévères. Malgré des traitements systémiques bien conduits (classiquement par ciclosporine ou méthotrexate), certains patients se retrouvent en impasse thérapeutique en raison d’effets indésirables non anodins à long terme chez des sujets jeunes qui devront vivre longtemps avec leur maladie chronique, d’échappements, de rechutes et/ou de non-réponse aux traitements. « Contrairement au psoriasis, note la Pr Staumont, il y a dans la DA, un besoin thérapeutique non couvert ».
Les publications se multiplient
Plusieurs biomédicaments sont actuellement en développement dans la DA et seront prochainement disponibles.
Le premier attendu dans la DA sévère devrait être le dupilumab. Cet anticorps monoclonal anti-IL-4 et IL-13 bloque la sous-unité alpha commune à leurs deux récepteurs. Les publications se multiplient (1,2,3). En 2016, deux études pivots ont été publiées dans le NEJM. À 16 semaines, dans ces deux études, le score de sévérité EASI est diminué de 75 % chez 50 % des patients avec une réduction du prurit et un bon profil de tolérance ; une étude débute chez l’adolescent. En France, une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) nominative a été ouverte fin novembre 2016 (les demandes faites pour des patients sévères sont en attente de réponse de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé [ANSM]). L’autorisation de mise sur le marché (AMM) de la Food and Drug Administration semble proche, l’AMM européenne devrait suivre à l’horizon 2019.
Parmi les autres biomédicaments en développement, citons des anti-IL-13, 22, et 31 qui bloquent les récepteurs aux prostaglandines des lymphocytes TH2 (impliqués dans la DA, à la différence du psoriasis où ce sont ceux des TH1 et des TH17).
Pour la Pr Staumont, « il va falloir apprendre à évaluer la qualité de vie de nos patients, ainsi que la sévérité de leurs atteintes, à mettre en route des biomédicaments pour les atteintes sévères qui ne répondent pas aux soins locaux et systémiques, voire à les prescrire avant les traitements actuels systémiques. En effet, même si ceux-ci peuvent avoir une efficacité rapide, leur toxicité freine leur prescription au long cours. Bien sûr, les biomédicaments qui arrivent dans la DA sévère devront trouver une place face à la ciclosporine, et répondre aux considérations médico-économiques, mais ils semblent très prometteurs ».
D’après un entretien avec la Pr Delphine Staumont, CHRU de Lille.
(1) Thaçi D et al. Lancet 2016;387:40-52
(2) Beck LA et al. N Engl J Med 2014;371:130-9
(3) Simpson EL et al. N Engl J Med 2016;375:233
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation